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Philippe Gardent garde intacte l'envie de construire

France

samedi 17 avril 2021 - © Yves Michel

 12 min 51 de lecture

La rencontre avec Jean-Paul Onillon a été déterminante. Aux côtés de l'ancien président du Paris Handball, Philippe Gardent se lance dans un projet ambitieux. Avec Bruges-Lormont, redonner à la Gironde et à l’agglomération bordelaise, le grand club d'élite qu'elles méritent. La tâche est colossale mais n'effraie pas "Boule" qui s'emploie à clôturer d'excellente manière son aventure toulousaine.

A 57 ans depuis peu, c'est le nouveau défi sportif que Philippe Gardent a accepté de relever. Non pas sur un coup de tête mais plutôt en faisant confiance à son intuition. Parce qu'aussi il a été séduit par le discours et la volonté d'un homme, Jean-Paul Onillon qu'il avait plusieurs fois croisé, avec lequel il avait plusieurs fois échangé, sans ne jamais concrétiser. Et puis en quelques mois, l'idée a mûri. (Re)bâtir un projet ambitieux, de haut niveau dans la région bordelaise, trois décennies après que les Girondins de Bordeaux aient tutoyé les sommets du hand national (avec une coupe de France et une place de 3ème), vingt ans après que ce même club ait entamé sa descente aux enfers jusqu'au dépôt de bilan. Le chef d'entreprise, ancien patron du Paris Handball avant l'arrivée des Qataris a cette fois posé ses valises à Bruges (à 7 km au nord de Bordeaux). Avec l'idée d'encore mieux structurer le club (qui couplé à l'agglomération de Lormont évolue en N1) en déposant dans un 1er temps, une demande de statut VAP aux fins d'accéder dans les plus brefs délais à la Proligue et plus si affinités. Convaincre les forces vives du secteur, ménager les susceptibilités, trouver de nouveaux partenaires, fédérer, composer un groupe, se projeter sur la construction d'une nouvelle salle... le chantier est gigantesque. C'est dans cette aventure que "Boule", l'ancien Barjot champion du Monde 1995 se lance sans oublier de mettre correctement fin à la parenthèse ouverte il y a six ans au Fénix de Toulouse. 

Philippe, comment es-tu arrivé dans ce projet ?  
Ça s'est fait vraiment en douceur. Je connaissais Jean-Paul (Onillon) depuis un moment et il était question, avant la période Covid, d'accorder deux wild-cards pour la Starligue, Bordeaux était concerné. Cela remonte à quand même un an et demi. Avec la pandémie, on n'en a plus entendu parler et il y a eu le passage à 16. Jean Paul était déjà dans le coup et comme on se connaissait, on avait échangé mais sans plus. 

En un an, le dossier a sacrément évolué...
Oui, parce qu'il y a la volonté d'un homme qui ne lâche rien. Onillon s'est orienté sur Bruges-Lormont, pour reprendre le club en N1, demander le statut VAP etc... Ce qui débouche sur l'actuel projet. Quand il a appris que je ne restais pas à Toulouse, on s'est revu, on a commencé à discuter. Cette fois, de façon plus... concrète. 

De ton côté, y'avait-il une envie de te remettre en question ?
(rires) Pas du tout ! C'est un choix humain qui m'a guidé. A 57 ans, j'ai le privilège de pouvoir mettre en avant ce type de paramètre. Bosser avec Jean Paul est prometteur parce que je connais l'homme et ceux qui l'entourent. Et puis c'est une aventure que je n'ai pas encore vécue. Faire monter un club dans la hiérarchie en partant d'aussi bas. 

Rien de comparable avec ce que tu as connu auparavant...
Disons que sur les trois expériences que j'ai eues, les proportions étaient totalement différentes. Quand je suis arrivé à Chambéry, ils étaient 13èmes, cinq ans après, on est champions. A Paris, qu'on le veuille ou non, tout était à construire. Ils venaient de se sauver juste avant, de la relégation, cela n'a pas été aussi simple que ça malgré l'argent investi. Et à Toulouse, la situation au classement n'était pas non plus exceptionnelle. Six ans plus tard, on est européen. J'ai plutôt une âme de bâtisseur et cela me plaît bien. 

A Bruges, quel sera exactement ton rôle ? 
Mon statut officiel, c'est d'être conseiller du président. 

Vaste notion. Seras-tu sur le banc ?
Très certainement (sourires).

Et tu prends Benoit Peyrabout comme adjoint...
En fait, j'ai toujours apprécié ce mec. Déjà quand il jouait, par ce qu'il dégageait. Je me suis ensuite bien renseigné sur la personne et je me suis aperçu qu'il correspondait au profil recherché. Il a une expérience sur le jeu, sur la manière de coacher,,, le feeling a fait le reste. 

Comment vas-tu répartir les tâches ? 
Jusqu'à maintenant, ceux qui ont travaillé avec moi, n'ont pas eu à se plaindre. Que ce soit Cavali, Perreux ou Andjelkovic. Il y a toujours un échange même si la décision finale m'appartient. 

Quelle serait la meilleure progression du club ?
Si on veut vraiment que les fondations soient saines, il faut monter en puissance sans brûler les étapes. Si tu construis une maison sur des fondations qui ne sont pas sèches, à un moment donné, elle va se casser la gueule. Même si on veut quand même aller vite. La saison qui arrive sera importante pour se structurer avec pas mal de choses à régler. Donc la N1 puis ambitionner la Proligue un an plus tard, cela me paraît pertinent. 
 

Tout est à faire et l'accueil sur place peut vous réserver quelques surprises...
Je n'en sais trop rien. Je suis pourtant persuadé que c'est une excellente chose que ce soit des gens de l'extérieur qui arrivent, sans a-priori. Ensuite, il y a une envie de fédérer tous les clubs du Bordelais autour du projet et c'est très important de concerner toutes les forces vives du département. 

Va se poser à terme, le problème de la salle (à peine 500 places actuellement)...
Ce qui est bien, c'est qu'il y a une volonté commune de construire une salle. Ce consensus, ça peut te faire gagner 10 ans ! Si la métropole est d'accord pour une nouvelle salle, elle sera construite (on parle d'une d'implantation sur la zone de Bordeaux-lac non loin du stade de football). Allez, on peut l'espérer dans 3 ans... si les planètes s'alignent correctement ! Et surtout, on n'arrive pas en terrain conquis. Tous ceux qui veulent nous rejoindre seront bien accueillis. 

As-tu conscience que ta notoriété sert le projet ? 
Forcément et j'espère que le fait d'arriver le crédibilise. Si j'accepte de m'investir en N1, c'est que je crois en ce qui est proposé. J'ai eu quelques sollicitations très intéressantes et j'ai privilégié la proposition de Jean Paul Onillon.  
 

Quelle est la philosophie du futur recrutement ?
Je ne me suis pas laissé endormir par ceux qui m'ont téléphoné pour me proposer des joueurs. Je les ai bien briefés sur ce que je veux. Et il faut savoir que les joueurs qui vont nous rejoindre (voir plus bas), c'est plutôt moi qui les ai contactés. On privilégie aussi des éléments qui sont du coin, passés pour certains, par le Pôle de Talence. 

D'où sortent d'excellents joueurs... 
Quand on réfléchit à ceux qui y sont passés et qui ont fui cette région, ça laisse perplexe. Bruges a beau être en N1, c'est un club déjà très bien installé. La région est la 2ème en nombre de licenciés Le but est de créer une structure qui tienne la route afin de freiner l'exode des talents.  



Quid de l'effectif actuel ? Certains ont connu la D1 
Par manque de temps... j'ai quand même un boulot à finir sur Toulouse... je n'ai pas encore rencontré ces joueurs. Cédric (Naffrichoux) et Jean Paul, les co-présidents les ont vus pour leur exposer le projet. Bien entendu, on veut s'appuyer sur l'ossature de Bruges donc plus de la moitié des joueurs actuels figurera dans l'effectif sous statut VAP. Un gars comme Paul Mourioux (notre photo) par exemple, en fera partie, je lui ai proposé d'être capitaine de l'équipe. Il y a une grosse volonté de notre part d'avoir une mixité entre des éléments expérimentés que tu es obligé d'aller chercher ailleurs et d'autres qui évoluaient au club cette saison. Il y a une ribambelle de jeunes que je veux connaître un peu plus. Fort de la convention qui existe entre Bruges et Lormont, on a l'avantage d'avoir une N1 VAP et une N2. Donc la passerelle va exister. J'envisage une revue d'effectif systématique toutes les semaines. 

Dans quel état d'esprit quittes-tu Toulouse et as-tu amené cette équipe au bout de ses possibilités ? 
Au bout des objectifs qu'on s'était fixé, oui ! Avec cette année la coupe d'Europe, ma mission est remplie. On a pérennisé ce club en D1 et on l'a fait avec un budget qui ne figure pas parmi les plus élevés. L'autre satisfaction, c'est le centre de formation. Ils étaient en N2, ils ont fini 1ers de la N1 et cela fonctionne très bien. Je peux partir l'esprit vraiment tranquille. 

Tu laisses les clés à Andjelkovic...
Je laisse, je pense un très bon héritage à un très bon mec ! Il a largement les compétences pour pouvoir prendre le relais. Au niveau des adjoints, j'ai toujours fait beaucoup confiance à mon intuition, la plupart sont devenus des amis. J'ai toujours voulu à mes côtés, quelqu'un qui avait une certaine culture du handball, un background, du recul et Benoît (Peyrabout), je pense, coche toutes les cases.
 



Un recrutement bien avancé   
 

Premier talent que "Boule" a su convaincre, Nicolas Minne (notre photo). Joueur au nom prédestiné tant son potentiel de shooteur est apprécié. Au fil du temps, Nicolas s'est fait un prénom et a su affoler ses propres compteurs. Notamment lors de l'exercice 2018-2019 au Cavigal Nice où il s'est affirmé comme meilleur buteur (113 réalisations) et meilleur passeur. Cette saison, malgré les résultats assez irréguliers de Sélestat, il figure dans le top 5 des artilleurs de Proligue avec une moyenne de 6 buts par match. «Je le connais bien puisque je l'ai eu au CF de Toulouse. On ne l'avait pas conservé et depuis, il a fait un parcours intelligent. Il a rongé son frein, il est parti à Nice, il est cette saison à Sélestat. Déjà à l'époque, il avait un bras très intéressant mais pas suffisant pour la Starligue et en 6 ans, il s'est aguerri et a conservé la même ambition. »

 

Nico se sera pas seul sur la base arrière avec l'arrivée de Xavier Moreau. Handballeur de devoir passé par la filière fédérale et surtout par le pôle de Talence sous la direction de Patrick Passemard. Ce sera donc un retour aux sources pour l'arrière gauche qui a découvert l'univers pro à Toulouse (entre 2008 et 2013) puis a ensuite souvent déménagé, entre Angers, Cherbourg, Limoges et donc Strasbourg où il officie encore cette saison sous la houlette du Grand, l'immense Denis Lathoud. Xav' fait partie de cette génération d'exception des 90/91 qui fournit à l'équipe de France des talents comme Valentin Porte ou Kentin Mahé. « Tout naturellement... Même si on ne recrute pas Xavier parce qu'il est du coin (sourires). Son expérience va nous être très utile. Il a vécu la montée, connu des situations complexes et ce n'est pas pour rien qu'il a été souvent désigné meilleur arrière gauche de la D2. Il vient d'être papa, sa volonté de revenir parmi les siens et le projet qu'on porte ont fini par le convaincre. »

Est-ce un hasard mais c'est aussi en Alsace qu'évolue actuellement la 3ème future recrue girondine. Après Minne, c'est son partenaire arrière droit sélestadien Antoine Gutfreund qui rejoint l'Aquitaine. Initié au handball dans le club du quartier de la Robertsau à Strasbourg puis à Sélestat. Il est passé durant cinq saisons par le centre de formation de Montpellier où il a même tutoyé l'élite et la Ligue des Champions. Le longiligne gaucher (1,95 – 90 kg) a remonté la vallée du Rhône, s'est arrêté à Dijon (2015-2016) avant de revenir en Alsace à... Sélestat où d'aucuns pensaient qu'il s'installerait définitivement d'autant que l'an dernier, il avait été nommé responsable marketing de l'ASPTT Strasbourg. « Je cherchais surtout un gaucher qui défende et pas forcément une mitraillette, avec Moreau et Minne, j'ai ce qui faut dans ce registre. Antoine a d'autres qualités qui correspondaient à mes recherches. Cela pourra évoluer et en plus, on lui a proposé un double projet en utilisant son savoir-faire dans le digital marketing. On pense aussi à l'avenir et à l'expansion du club. Et il vaut mieux prendre quelqu'un de l'intérieur. »


C'est à 8 ans que Mathieu Vigneron est tombé dans le handball, un peu par atavisme puisque son père entraînait l'Etoile de Beauvallon dans la Drôme. Après un passage par Livron puis Valence chez les moins de 18, l'ailier gauche intègre le centre de formation de Chambéry dont l'équipe évolue en N1. Il a suivi la filière fédérale mais n'a malheureusement pas pu s'exprimer lors des deux dernières saisons puisque sa génération (2000-2001) a été privée d'Euro et de Mondial juniors, « C'est un profil que j'aime. Il a une belle mentalité de guerrier et en plus, c'est un ailier qui défend en 2, c'est un atout. Il a toute sa place dans l'aventure. Pour quelqu'un qui sort d'un centre, c'est la trajectoire idéale. »


 
Parmi les nouveaux visages de ce qui à terme devrait être un vrai club de terroir avec une identité girondine mais aussi bordelaise, un jeune demi-centre Loucas Contiero (20 ans), actuellement pensionnaire du centre de formation de Pays d'Aix qui retrouvera ses racines familiales puisque son papa Francis, restaurateur reconnu est aussi un dirigeant du club de Lormont. Un autre jeune talent viendra renforcer ce groupe qui prend forme: Paul-Louis Guiraudou (photo ci-dessus). Issu du centre de formation de Montpellier, le natif de Clermont l'Hérault saisit à 21 ans, une excellente opportunité. « Il y avait Imanol Carrère pur produit du club mais qui a donné son accord à Ivry avant que le projet prenne forme. Le timing a joué contre nous. Paul Louis fait partie d'une génération (2000-2001) que je suis depuis un moment. Ce qui est intéressant, c'est qu'il a du potentiel mais il faut l'aider à grandir. Et comme je connais un peu le poste (sourires) il bénéficiera de toute mon attention. »
 

Deux postes restent à pourvoir. Un gardien et un autre pivot (n°1) qui devront dégager la même volonté d'investissement dans un projet ambitieux. « On y travaille mais on garde les pieds sur terre. Je ne veux pas m'engager avec des joueurs pour une saison et avoir tout à recommencer un an plus tard. » Un gardien expérimenté. Le portrait robot aurait pu avoir les traits de Patrice Annonay mais pour convenances personnelles, « Papat » a préféré rester en région parisienne. « Peut-être suis-je difficile ou plutôt exigeant, s'interroge Philippe Gardent. J'ai un tout jeune gardien de 18 ans en n°2, qui a du talent mais il lui faut à côté quelqu’un de totalement aguerri. Le but est d'avoir dans les buts quelqu'un qui soit capable de faire N1-D2 dans la continuité. Pour l'instant, je n'ai pas trouvé mais je ne cède à aucune précipitation. Par ailleurs, le budget n'est pas extensible,»  La piste à l'extérieur de l'espace national (peut-être Israël ?) semble être une évidence. 

Dans l'incertitude d'une année qui sera encore rythmée par la pandémie et d'un championnat de Nationale 1 masculine arrêté officiellement et définitivement début mars, le projet Bordeaux-Bruges-Lormont (il faudra bientôt s'habituer à l'acronyme B-B-L) est sur les rails. Enfin ! serait-on tenté de soupirer tant cette région Aquitaine a besoin dans le handball d'une représentation masculine au plus haut niveau. 

Philippe Gardent garde intacte l'envie de construire 

France

samedi 17 avril 2021 - © Yves Michel

 12 min 51 de lecture

La rencontre avec Jean-Paul Onillon a été déterminante. Aux côtés de l'ancien président du Paris Handball, Philippe Gardent se lance dans un projet ambitieux. Avec Bruges-Lormont, redonner à la Gironde et à l’agglomération bordelaise, le grand club d'élite qu'elles méritent. La tâche est colossale mais n'effraie pas "Boule" qui s'emploie à clôturer d'excellente manière son aventure toulousaine.

A 57 ans depuis peu, c'est le nouveau défi sportif que Philippe Gardent a accepté de relever. Non pas sur un coup de tête mais plutôt en faisant confiance à son intuition. Parce qu'aussi il a été séduit par le discours et la volonté d'un homme, Jean-Paul Onillon qu'il avait plusieurs fois croisé, avec lequel il avait plusieurs fois échangé, sans ne jamais concrétiser. Et puis en quelques mois, l'idée a mûri. (Re)bâtir un projet ambitieux, de haut niveau dans la région bordelaise, trois décennies après que les Girondins de Bordeaux aient tutoyé les sommets du hand national (avec une coupe de France et une place de 3ème), vingt ans après que ce même club ait entamé sa descente aux enfers jusqu'au dépôt de bilan. Le chef d'entreprise, ancien patron du Paris Handball avant l'arrivée des Qataris a cette fois posé ses valises à Bruges (à 7 km au nord de Bordeaux). Avec l'idée d'encore mieux structurer le club (qui couplé à l'agglomération de Lormont évolue en N1) en déposant dans un 1er temps, une demande de statut VAP aux fins d'accéder dans les plus brefs délais à la Proligue et plus si affinités. Convaincre les forces vives du secteur, ménager les susceptibilités, trouver de nouveaux partenaires, fédérer, composer un groupe, se projeter sur la construction d'une nouvelle salle... le chantier est gigantesque. C'est dans cette aventure que "Boule", l'ancien Barjot champion du Monde 1995 se lance sans oublier de mettre correctement fin à la parenthèse ouverte il y a six ans au Fénix de Toulouse. 

Philippe, comment es-tu arrivé dans ce projet ?  
Ça s'est fait vraiment en douceur. Je connaissais Jean-Paul (Onillon) depuis un moment et il était question, avant la période Covid, d'accorder deux wild-cards pour la Starligue, Bordeaux était concerné. Cela remonte à quand même un an et demi. Avec la pandémie, on n'en a plus entendu parler et il y a eu le passage à 16. Jean Paul était déjà dans le coup et comme on se connaissait, on avait échangé mais sans plus. 

En un an, le dossier a sacrément évolué...
Oui, parce qu'il y a la volonté d'un homme qui ne lâche rien. Onillon s'est orienté sur Bruges-Lormont, pour reprendre le club en N1, demander le statut VAP etc... Ce qui débouche sur l'actuel projet. Quand il a appris que je ne restais pas à Toulouse, on s'est revu, on a commencé à discuter. Cette fois, de façon plus... concrète. 

De ton côté, y'avait-il une envie de te remettre en question ?
(rires) Pas du tout ! C'est un choix humain qui m'a guidé. A 57 ans, j'ai le privilège de pouvoir mettre en avant ce type de paramètre. Bosser avec Jean Paul est prometteur parce que je connais l'homme et ceux qui l'entourent. Et puis c'est une aventure que je n'ai pas encore vécue. Faire monter un club dans la hiérarchie en partant d'aussi bas. 

Rien de comparable avec ce que tu as connu auparavant...
Disons que sur les trois expériences que j'ai eues, les proportions étaient totalement différentes. Quand je suis arrivé à Chambéry, ils étaient 13èmes, cinq ans après, on est champions. A Paris, qu'on le veuille ou non, tout était à construire. Ils venaient de se sauver juste avant, de la relégation, cela n'a pas été aussi simple que ça malgré l'argent investi. Et à Toulouse, la situation au classement n'était pas non plus exceptionnelle. Six ans plus tard, on est européen. J'ai plutôt une âme de bâtisseur et cela me plaît bien. 

A Bruges, quel sera exactement ton rôle ? 
Mon statut officiel, c'est d'être conseiller du président. 

Vaste notion. Seras-tu sur le banc ?
Très certainement (sourires).

Et tu prends Benoit Peyrabout comme adjoint...
En fait, j'ai toujours apprécié ce mec. Déjà quand il jouait, par ce qu'il dégageait. Je me suis ensuite bien renseigné sur la personne et je me suis aperçu qu'il correspondait au profil recherché. Il a une expérience sur le jeu, sur la manière de coacher,,, le feeling a fait le reste. 

Comment vas-tu répartir les tâches ? 
Jusqu'à maintenant, ceux qui ont travaillé avec moi, n'ont pas eu à se plaindre. Que ce soit Cavali, Perreux ou Andjelkovic. Il y a toujours un échange même si la décision finale m'appartient. 

Quelle serait la meilleure progression du club ?
Si on veut vraiment que les fondations soient saines, il faut monter en puissance sans brûler les étapes. Si tu construis une maison sur des fondations qui ne sont pas sèches, à un moment donné, elle va se casser la gueule. Même si on veut quand même aller vite. La saison qui arrive sera importante pour se structurer avec pas mal de choses à régler. Donc la N1 puis ambitionner la Proligue un an plus tard, cela me paraît pertinent. 
 

Tout est à faire et l'accueil sur place peut vous réserver quelques surprises...
Je n'en sais trop rien. Je suis pourtant persuadé que c'est une excellente chose que ce soit des gens de l'extérieur qui arrivent, sans a-priori. Ensuite, il y a une envie de fédérer tous les clubs du Bordelais autour du projet et c'est très important de concerner toutes les forces vives du département. 

Va se poser à terme, le problème de la salle (à peine 500 places actuellement)...
Ce qui est bien, c'est qu'il y a une volonté commune de construire une salle. Ce consensus, ça peut te faire gagner 10 ans ! Si la métropole est d'accord pour une nouvelle salle, elle sera construite (on parle d'une d'implantation sur la zone de Bordeaux-lac non loin du stade de football). Allez, on peut l'espérer dans 3 ans... si les planètes s'alignent correctement ! Et surtout, on n'arrive pas en terrain conquis. Tous ceux qui veulent nous rejoindre seront bien accueillis. 

As-tu conscience que ta notoriété sert le projet ? 
Forcément et j'espère que le fait d'arriver le crédibilise. Si j'accepte de m'investir en N1, c'est que je crois en ce qui est proposé. J'ai eu quelques sollicitations très intéressantes et j'ai privilégié la proposition de Jean Paul Onillon.  
 

Quelle est la philosophie du futur recrutement ?
Je ne me suis pas laissé endormir par ceux qui m'ont téléphoné pour me proposer des joueurs. Je les ai bien briefés sur ce que je veux. Et il faut savoir que les joueurs qui vont nous rejoindre (voir plus bas), c'est plutôt moi qui les ai contactés. On privilégie aussi des éléments qui sont du coin, passés pour certains, par le Pôle de Talence. 

D'où sortent d'excellents joueurs... 
Quand on réfléchit à ceux qui y sont passés et qui ont fui cette région, ça laisse perplexe. Bruges a beau être en N1, c'est un club déjà très bien installé. La région est la 2ème en nombre de licenciés Le but est de créer une structure qui tienne la route afin de freiner l'exode des talents.  



Quid de l'effectif actuel ? Certains ont connu la D1 
Par manque de temps... j'ai quand même un boulot à finir sur Toulouse... je n'ai pas encore rencontré ces joueurs. Cédric (Naffrichoux) et Jean Paul, les co-présidents les ont vus pour leur exposer le projet. Bien entendu, on veut s'appuyer sur l'ossature de Bruges donc plus de la moitié des joueurs actuels figurera dans l'effectif sous statut VAP. Un gars comme Paul Mourioux (notre photo) par exemple, en fera partie, je lui ai proposé d'être capitaine de l'équipe. Il y a une grosse volonté de notre part d'avoir une mixité entre des éléments expérimentés que tu es obligé d'aller chercher ailleurs et d'autres qui évoluaient au club cette saison. Il y a une ribambelle de jeunes que je veux connaître un peu plus. Fort de la convention qui existe entre Bruges et Lormont, on a l'avantage d'avoir une N1 VAP et une N2. Donc la passerelle va exister. J'envisage une revue d'effectif systématique toutes les semaines. 

Dans quel état d'esprit quittes-tu Toulouse et as-tu amené cette équipe au bout de ses possibilités ? 
Au bout des objectifs qu'on s'était fixé, oui ! Avec cette année la coupe d'Europe, ma mission est remplie. On a pérennisé ce club en D1 et on l'a fait avec un budget qui ne figure pas parmi les plus élevés. L'autre satisfaction, c'est le centre de formation. Ils étaient en N2, ils ont fini 1ers de la N1 et cela fonctionne très bien. Je peux partir l'esprit vraiment tranquille. 

Tu laisses les clés à Andjelkovic...
Je laisse, je pense un très bon héritage à un très bon mec ! Il a largement les compétences pour pouvoir prendre le relais. Au niveau des adjoints, j'ai toujours fait beaucoup confiance à mon intuition, la plupart sont devenus des amis. J'ai toujours voulu à mes côtés, quelqu'un qui avait une certaine culture du handball, un background, du recul et Benoît (Peyrabout), je pense, coche toutes les cases.
 



Un recrutement bien avancé   
 

Premier talent que "Boule" a su convaincre, Nicolas Minne (notre photo). Joueur au nom prédestiné tant son potentiel de shooteur est apprécié. Au fil du temps, Nicolas s'est fait un prénom et a su affoler ses propres compteurs. Notamment lors de l'exercice 2018-2019 au Cavigal Nice où il s'est affirmé comme meilleur buteur (113 réalisations) et meilleur passeur. Cette saison, malgré les résultats assez irréguliers de Sélestat, il figure dans le top 5 des artilleurs de Proligue avec une moyenne de 6 buts par match. «Je le connais bien puisque je l'ai eu au CF de Toulouse. On ne l'avait pas conservé et depuis, il a fait un parcours intelligent. Il a rongé son frein, il est parti à Nice, il est cette saison à Sélestat. Déjà à l'époque, il avait un bras très intéressant mais pas suffisant pour la Starligue et en 6 ans, il s'est aguerri et a conservé la même ambition. »

 

Nico se sera pas seul sur la base arrière avec l'arrivée de Xavier Moreau. Handballeur de devoir passé par la filière fédérale et surtout par le pôle de Talence sous la direction de Patrick Passemard. Ce sera donc un retour aux sources pour l'arrière gauche qui a découvert l'univers pro à Toulouse (entre 2008 et 2013) puis a ensuite souvent déménagé, entre Angers, Cherbourg, Limoges et donc Strasbourg où il officie encore cette saison sous la houlette du Grand, l'immense Denis Lathoud. Xav' fait partie de cette génération d'exception des 90/91 qui fournit à l'équipe de France des talents comme Valentin Porte ou Kentin Mahé. « Tout naturellement... Même si on ne recrute pas Xavier parce qu'il est du coin (sourires). Son expérience va nous être très utile. Il a vécu la montée, connu des situations complexes et ce n'est pas pour rien qu'il a été souvent désigné meilleur arrière gauche de la D2. Il vient d'être papa, sa volonté de revenir parmi les siens et le projet qu'on porte ont fini par le convaincre. »

Est-ce un hasard mais c'est aussi en Alsace qu'évolue actuellement la 3ème future recrue girondine. Après Minne, c'est son partenaire arrière droit sélestadien Antoine Gutfreund qui rejoint l'Aquitaine. Initié au handball dans le club du quartier de la Robertsau à Strasbourg puis à Sélestat. Il est passé durant cinq saisons par le centre de formation de Montpellier où il a même tutoyé l'élite et la Ligue des Champions. Le longiligne gaucher (1,95 – 90 kg) a remonté la vallée du Rhône, s'est arrêté à Dijon (2015-2016) avant de revenir en Alsace à... Sélestat où d'aucuns pensaient qu'il s'installerait définitivement d'autant que l'an dernier, il avait été nommé responsable marketing de l'ASPTT Strasbourg. « Je cherchais surtout un gaucher qui défende et pas forcément une mitraillette, avec Moreau et Minne, j'ai ce qui faut dans ce registre. Antoine a d'autres qualités qui correspondaient à mes recherches. Cela pourra évoluer et en plus, on lui a proposé un double projet en utilisant son savoir-faire dans le digital marketing. On pense aussi à l'avenir et à l'expansion du club. Et il vaut mieux prendre quelqu'un de l'intérieur. »


C'est à 8 ans que Mathieu Vigneron est tombé dans le handball, un peu par atavisme puisque son père entraînait l'Etoile de Beauvallon dans la Drôme. Après un passage par Livron puis Valence chez les moins de 18, l'ailier gauche intègre le centre de formation de Chambéry dont l'équipe évolue en N1. Il a suivi la filière fédérale mais n'a malheureusement pas pu s'exprimer lors des deux dernières saisons puisque sa génération (2000-2001) a été privée d'Euro et de Mondial juniors, « C'est un profil que j'aime. Il a une belle mentalité de guerrier et en plus, c'est un ailier qui défend en 2, c'est un atout. Il a toute sa place dans l'aventure. Pour quelqu'un qui sort d'un centre, c'est la trajectoire idéale. »


 
Parmi les nouveaux visages de ce qui à terme devrait être un vrai club de terroir avec une identité girondine mais aussi bordelaise, un jeune demi-centre Loucas Contiero (20 ans), actuellement pensionnaire du centre de formation de Pays d'Aix qui retrouvera ses racines familiales puisque son papa Francis, restaurateur reconnu est aussi un dirigeant du club de Lormont. Un autre jeune talent viendra renforcer ce groupe qui prend forme: Paul-Louis Guiraudou (photo ci-dessus). Issu du centre de formation de Montpellier, le natif de Clermont l'Hérault saisit à 21 ans, une excellente opportunité. « Il y avait Imanol Carrère pur produit du club mais qui a donné son accord à Ivry avant que le projet prenne forme. Le timing a joué contre nous. Paul Louis fait partie d'une génération (2000-2001) que je suis depuis un moment. Ce qui est intéressant, c'est qu'il a du potentiel mais il faut l'aider à grandir. Et comme je connais un peu le poste (sourires) il bénéficiera de toute mon attention. »
 

Deux postes restent à pourvoir. Un gardien et un autre pivot (n°1) qui devront dégager la même volonté d'investissement dans un projet ambitieux. « On y travaille mais on garde les pieds sur terre. Je ne veux pas m'engager avec des joueurs pour une saison et avoir tout à recommencer un an plus tard. » Un gardien expérimenté. Le portrait robot aurait pu avoir les traits de Patrice Annonay mais pour convenances personnelles, « Papat » a préféré rester en région parisienne. « Peut-être suis-je difficile ou plutôt exigeant, s'interroge Philippe Gardent. J'ai un tout jeune gardien de 18 ans en n°2, qui a du talent mais il lui faut à côté quelqu’un de totalement aguerri. Le but est d'avoir dans les buts quelqu'un qui soit capable de faire N1-D2 dans la continuité. Pour l'instant, je n'ai pas trouvé mais je ne cède à aucune précipitation. Par ailleurs, le budget n'est pas extensible,»  La piste à l'extérieur de l'espace national (peut-être Israël ?) semble être une évidence. 

Dans l'incertitude d'une année qui sera encore rythmée par la pandémie et d'un championnat de Nationale 1 masculine arrêté officiellement et définitivement début mars, le projet Bordeaux-Bruges-Lormont (il faudra bientôt s'habituer à l'acronyme B-B-L) est sur les rails. Enfin ! serait-on tenté de soupirer tant cette région Aquitaine a besoin dans le handball d'une représentation masculine au plus haut niveau. 

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