L'entretien est détendu. Il faut dire que le cadre s'y prête, même si la météo est "fraichoullotte" pour un mois de mai… En plein air, assis autour d'une table au milieu de la verdure et à proximité de l'antre de Guy Drut. En toute discrétion, tranquillement… A l'image de Mathieu Soille… Ainsi, l’homme se dévoile, paisible, sans un mot plus haut que l'autre. Fidèle à lui-même. Pas le style de la maison. Alors posément, le célèbre "Mamath" dévoile son fabuleux destin.
« Neuville du Poitou. Quai d'embarquement. Début de l'aventure..."
Né un 23 avril 1981 en terre normande, à Vernon précisément, Mathieu va vite apprendre ce qu'est la mobilité géographique. Ses cinq premières années de son enfance "écoulées" sous le soleil martiniquais (On peut faire pire comme destination…). Il faut dire qu'avec un père gendarme et une mère professeur de français, mieux vaut prévoir une bonne agence de déménagement. On est souvent appelé à voir du pays !... Tout d'abord, c'est à Neuville du Poitou (la tradition du goût !...) que "Mamath" entame son périple handballistique : "Avec une bande de copains, je "touchais" au foot, au tennis, à "l'athlé" aussi. Le hand, j’ai essayé comme ça et j'ai continué car cela me plaisait". En parallèle, l'élève est studieux. Parcours scolaire réussi : Bac L, préparation littéraire. Une faculté d'anglais, avec un CAPES à la clé. Tout ceci pour enseigner la langue de Shakespeare... Joli chemin.
Sportivement, Mathieu Soille avance, tranquille... Equipe jeunes à Migné Auxances, des sélections départementales, intégration de la section sportive (CREFEN) à Poitiers à l'âge de 15 ans et des stages "demi-zone". "C'est l'avant dernière étape avant l'équipe de France. Bon, cela n'a jamais été une finalité en moi. J'ai pris du plaisir. La priorité était de préparer un avenir professionnel " nous confie celui que nous surnommons "Chégo" (gaucher en verlan...). Ensuite, « Chégo » dépose son balluchon de handballeur à Poitiers (Nationale 3). C'est alors parti pour une belle aventure avec, à son apogée, la Nationale 1. "Une montée fabuleuse ! Se souvient le poitevin d’adoption. Nous n'étions pas les favoris, ni les plus costauds. Seulement il y avait un certain feeling entre nous. A la tête de ce groupe, Jean-Pierre Igoulene. Un sacré bonhomme, c'est devenu un ami. Il avait su trouver les bons mots, véhiculer un message fort psychologiquement..." Mathieu s'arrête quelques instants, on sent de l'émotion dans sa voix...
« SAINT CYR SUR LOIRE, LE S.C.T prochaine escale ... »
Arrivé en 2004, (ce qui en fait avec Laszlo Fulop, « le dernier des mohicans »…), "Chégo" connait des débuts difficiles. Six mois éloigné des terrains, la faute à un kyste mal placé !... Sous les ordres de Laurent Bezeau, l'équipe échoue à la montée, de peu, à la troisième place. Ce n'est que partie remise. La saison suivante sera la bonne. Mathieu se souvient : " On avait une équipe prototype "montée impérative", avec un mentor, Serguei Bebeshko. On avait une étiquette de "mercenaires" partout où on allait. De beaux moments en tout cas. Un souvenir ? : Le match à Bordeaux qui tourne en bagarre générale et Serguei qui fait un ippon sur un girondin. Un truc de fou..."
Ainsi, depuis quatre saisons, le saint-cyrien arpente, inlassablement, les ailes des terrains de "France et de Navarre de la D2..." Je suis bien content d'être là, de faire partie de l'aventure ». A la question : "Petit, tu y songeais à ce destin ?" Mathieu réplique gentiment : "Non bien sûr. C’est du pur bonheur. Attention, je garde les pieds rivés au sol. C'est aussi grâce au travail accompli à chaque fois. Je n'avais pas un talent inné, non plus. Seulement, juste la chance d'être au bon endroit, au bon moment. Oui, ma motivation, c’est de vivre un truc fort avec des "potes"..." Puis de reprendre : "Depuis trois saisons, au SCT, je ressens plus un noyau dur, un vécu qui se dégage. Nous sommes une vraie équipe de "potes", de gars qui se battent l’un pour l'autre..." Et de poursuivre : "Oui, maintenant, faire une saison en LNH, j'en rêve. Normal quand tu es aux portes..." Alors j'aurai tout connu comme ça ! »
Prof la semaine, handballeur le weekend...
En effet, Mathieu est le seul amateur du collectif saint cyrien. Professeur d'anglais au collège Gaston Deferre à Preuilly sur Claise, "Teacher" Soille enchaine, continuellement depuis Monnaie, son port d'attache, les kilomètres (près de deux cent au quotidien…) les cours, les conseils de classes, les entraînements, les déplacements. "J’ai toujours connu ce rythme. Concilier études puis travail avec le hand. Attention, pour moi, ce n'est pas une excuse si je me loupe sur un match. Il m’était primordial, d'assurer mon avenir. Ne pas connaitre l’angoisse du contrat non reconduit, la période de doute. Faire du hand, à mes yeux, n'a jamais été une finalité. Juste profiter du moment présent avec mes coéquipiers, mes" potes". Ce qui arrive là, c'est du pur bonheur !..."
Un avenir (sportif) en suspens...
Quand son emploi du temps lui laisse du répit, « Mamath » est un amateur de soleil, d'océan, mais aussi d'un Tennis entre "vrais amis". Un passionné de cinéma, de musique tribale, aussi : "Une musique où il y a une âme...", du groupe Dead Can Dance : "De la musique aborigène, qui me rappelle l'été 2001 passé en Australie avec mon amie Camille ». Aussi, le "rabelaisien" d'adoption sait savourer, avec envie, les plats mijotés par « sa douce » Camille, et, est toujours partant pour découvrir un vignoble de Touraine (en toute modération, bien entendu...)
Arrive, enfin, l'évocation de l'avenir. Là, Mathieu précise : "Je tiens à terminer le travail, à savoir l'accession en LNH. Ainsi, la boucle sera bouclée... J'aurai connu tous les niveaux... Après on verra... "Wait and see... ». Il peut y avoir des projets personnels, familiaux. Des opportunités également... Faut voir..." confie le paisible Mathieu... et de préciser : "Si cela était à refaire, je ne changerai rien. J'ai pris ce qui venait, aussi je prendrai ce qui vient, avec plaisir... En tout ca, mes années saint cyriennes auront été fortes, riches en émotions. On me les enlèvera pas..."
La discussion s'achève. Quelques clichés pour illustrer l'instant. Après "Chégo" va aller transpirer sur le tarmac de la salle Guy Drut et préparer au mieux l’échéance capitale de Gonfreville. Après celle-ci, le professeur retrouvera ses élèves pour un voyage scolaire au Pays de Galles … Encore un nouveau périple… C’était le récit du « fabuleux destin de Mathieu Soille », « l’histoire d’un mec », comme disait Coluche… Attachant, discret et sincère… Avec, comme clap de fin : "Aaauucchh, mec !..."
Christophe Poupault