Parmi les gens connus nés dans la ville suédoise d'Eskilstuna, vous pouvez trouver Anni-Frid Lyngstadt, une des chanteuses (la Rousse) de ABBA, le footballeur Kennet Andersson passé dans les années 90 par Lille et Caen, et Tomas Svensson (né en 1968), légende du handball mondial et un des très grands gardiens de but de l'histoire de ce sport.
C'est à 4 ans et demi, et donc à Eskilstuna que Tomas touche son premier ballon. "Je suis issu d'une famille sportive. Mon père faisait du hand et du water-polo. J'ai essayé plein d'autres sports, collectifs ou individuels, mais je suis resté au hand car c'était ce qui me plaisait le plus. Tout comme j'ai tout de suite été attiré par le poste de gardien, quel que soit le sport d'ailleurs. Au foot, au hockey, au water-polo, j'étais toujours gardien." Comme pour tous les gamins de son âge, faire du sport c'est s'amuser, jusqu'à 15 ans pour Tomas puisqu'il décide de passer un cap: "J'étais prometteur semble-t-il, et je me suis dit que pour faire quelque chose de grand il fallait y mettre les moyens. Et bosser!"
En 1988, le travail a payé. Il intègre la grande équipe nationale de Suède et honore à 20 ans sa première cape contre la Hongrie. "J'étais très fier et très nerveux. Après le match, j'ai réalisé tout le boulot qu'il y avait pour arriver au même niveau que ces gars-là... et y rester." Ce niveau il l'atteint puisqu'il est champion du monde en 1990 (il le sera à nouveau en 1999) et rejoint le championnat d'Espagne, à l'Atletico Madrid.
Mais, en durant l'hiver 1991 à Gottröra, petite ville suédoise, survient l'épisode qui aurait pu tout bouleverser: Tomas Svensson est victime d'un accident d'avion. A l'évocation de ce moment, ses yeux brillent et on sent l'émotion dans ses propos: "C'était un miracle... Un miracle, oui, qu'il n'y ait pas eu de mort. Les moteurs ont explosé et on a dû planer quelques minutes pour essayer d'atteindre un lac gelé. On s'est crashé en pleine forêt! Je me souviens que je ne pensais pas "je vais peut-être mourir", mais "je SAIS que je vais mourir !" Le choc au sol est tel que l'avion est séparé en trois parties. "A partir de là, j'ai vu la vie autrement..." Handballeur professionnel et jouant en équipe nationale, cela implique de nombreux voyages en avion: "Au début, j'ai eu beaucoup de mal à retourner dans un avion. Mais il a bien fallu faire un choix. Soit je retournais chez moi et je jouais dans l'équipe de ma ville, soit je vivais avec cette peur et poursuivais ma carrière." Le choix on le connaît. Dans une carrière qui est passée par Irun, Barcelone, Hambourg, Pampelune, Valladolid et maintenant les Rhein-Neckar Löwen, Tomas a tout gagné: 2 Mondiaux, 3 Euros, 6 Ligues des Champions (oui, 6!, 1 avec Irun "Une sacrée performance pour une petite ville comme Irun) et 5 avec le grand Barca). On passe sur les titres en championnat ou en coupe d'Espagne. Seule "ombre" au tableau, si on ose dire, les 3 médailles d'argent olympiques en 92, 96 et 2000. "On peut voir ça de deux façons. La négative: oui, c'est vrai avec cette grande équipe de Suède, je n'ai jamais gagné l'or olympique. Ou alors il faut positiver: 3 médailles olympiques, c'est énorme, peu importe la couleur! Et certaines médailles d'argent ou de bronze peuvent avoir au moins autant de valeur que l'or!" Et Tomas de nous sortir alors l'argument imparable pour justifier ça: "Je suis sûr que le bronze à Barcelone en 92 a fait au moins autant plaisir aux Français que l'or a pu le faire aux Russes!"
Tomas Svensson a 43 ans et ne sait pas encore quand il arrêtera sa carrière de joueur. "Je ne sais pas quand sera mon dernier match, mais je sais que je serai entraîneur de gardiens et c'est pour cela que je suis venu aux Löwen. Je suis à mi-chemin entre les deux: je joue moins, mais je sers de relais entre le coach et les gardiens. En tout cas, je suis très fier de ma carrière, 20 ans en équipe nationale de Suède, ça représente quelque chose." Oui, chapeau bas. Au fait, Tomas prend l'avion sans problème maintenant...
Eric Seyller
Euromag