Deux ans que Maakan Tounkara espérait sans attendre et y croire vraiment. Et puis Alain Portes est arrivé et a très rapidement pensé à l’ailière droite du Fleury Loiret HB pour le Mondial qui débute en fin de semaine en Serbie. Une nouvelle aventure commence pour l'un et l'autre.
Maakan Tounkara est de retour chez les Bleues ! Comme à son habitude, elle a répondu à l’invitation d’Alain Portes sans trop se faire remarquer, sans revendiquer le moindre statut. Mais se replonger dans cet univers lui fait un bien fou. Car rien n’a été simple. Flashback.
En 2006, elle est à l’Euro en Suède. Olivier Krumbholz n’est pas satisfait de sa prestation, la renvoie en France et appelle Katty Piéjos. Frustrée mais pas résignée, elle réapparait sur le Mondial 2007. A domicile, l’équipe de France termine, 5ème , la jeune ailière ne s’en sort pas trop mal. Elle parvient à prendre le bon wagon de la préparation pour les Jeux, se retrouve à Pékin et vit le cauchemar de ce quart de finale perdu d’un but après prolongations face à la Russie. Durant toutes ces années, sa vie de joueuse a pris le pas sur sa vie de femme. En 2009, elle décide de faire un break, son désir de donner la vie est plus fort que tout. Mais le destin s’en mêle et rien ne se passe comme souhaité. Une grossesse difficile, la perte du bébé, Maakan Tounkara chancelle mais ne tombe pas. Avec Fred Bougeant son compagnon et entraîneur, elle décide de faire face mais la cicatrice ne se refermera jamais. Alors, c’est une nouvelle fois dans le handball qu’elle puise l’énergie nécessaire pour avancer.
Le retour sur les parquets est programmé en octobre 2010, les spectateurs des Docks lui réservent un accueil très chaleureux. La native d’Epernay a retrouvé la flamme, elle frappe à nouveau à la porte de la sélection. Le Brésil est tout proche mais l’histoire se répète. Juste avant le Tournoi de Paris, Olivier Krumbholz décide de débarquer trois filles, elle fait partie de la charrette. Personne n’entendra plus parler d’elle jusqu’à l’été dernier. Depuis une saison, Frédéric Bougeant a quitté le Havre pour Fleury, Maakan Tounkara a bien entendu suivi le mouvement et en août, c’est le déclic. Elle remet les chaussures de sports….
Maakan, l’imprévu réserve quelque fois des surprises….
Au départ, j’avais seulement envie de reprendre une activité physique et comme je connaissais toutes les filles de Fleury, je me suis dite « pourquoi pas avec elles ?» Tout s’est enchaîné, rien n’était programmé et je retrouve l’équipe de France.
Deux ans après en avoir été chassée…
La prépa pour le Brésil s’était bien passée, je pensais avoir fait le nécessaire mais l’entraîneur décide d’amener quelqu’un d’autre. On ne peut que s’y conformer, c’est dur mais c’est la règle.
Tu as quand même mal vécu cette situation…
C’est vrai, j’étais vraiment déçue car j’avais bossé pour retrouver le haut niveau. Je m’étais réellement battue même si à l’époque j’avais bénéficié de la place laissée vacante par Katty (Piéjos) qui s’était "fait" les croisés. Je voulais vraiment défendre ma chance.
Ton retour cette fois, coïncide avec un changement de staff…
Cela va au-delà car Alain Portes a également injecté du sang neuf dans cette équipe. Tout est vraiment différent par rapport à 2011 et à ma dernière sélection chez les Bleues. On dit souvent que le changement fait du bien et c’est le cas. Je découvre une autre approche du handball. Il y a un plaisir partagé, un dialogue permanent. Et puis, la grosse différence, c’est que c’est plus calme qu’avant (rires).
Drôle de sensations aussi quand tu as perçu le nouvel équipement ?
Deux ans après ! Je savoure cela différemment, sans doute plus intensément que par le passé. Je ne m’y attendais pas, c’est toujours un plaisir et un honneur d’être en équipe de France.
Les aléas les plus intimes de la vie t’ont-ils rendu plus forte ?
Complètement. Face à certaines situations, je relativise beaucoup plus. Je pense qu’à la base, j’étais quelqu’un de solide mais tout ce qu’il m’a fallu traverser, m’a rendu encore plus forte. Je suis obligé d’avancer car cela devient pesant à force. Tu cogites, tu vois le mal partout. C’est vrai que maintenant, j’arrive dans un autre état d’esprit.
Le handball est un excellent palliatif…
Plus que le handball, le sport en général m’a beaucoup aidé. Si je n’avais pas eu ça, je ne sais pas si on peut se relever aussi vite des évènements que j’ai traversés.
Tu es une ancienne désormais, ton expérience sera très précieuse.
Mon expérience peut aussi aider les plus jeunes à préparer une compétition comme le Mondial car nous, on est déjà passé par là. Il faut essayer de les déstresser au maximum car ce n’est pas évident à 20 ans, d’arriver dans un tel environnement. Il faut qu’elles restent calmes tout en gardant la fougue de leur jeunesse.
Si tu es là, c’est aussi pour que tu apportes sur le terrain…
Je partage le poste avec Audrey (Deroin). C’est une fille toujours en mouvement, enthousiaste. Moi je suis plutôt dans un registre un peu plus calme, plus mesuré. A moment donné, on aura besoin des deux. Audrey, il faut la laisser s’exprimer, elle est plus dans la spontanéité, elle tente plus de choses. On sait qu’avec l’âge, il y a des choses qu’on peut faire et d’autres qu’on peut moins faire. Même si je tiens à préciser que j’ai toujours ma pointe de vitesse, mon explosivité et je pense désormais, un peu plus de sérénité. On est complètement opposées mais on peut être complémentaires. Ça peut faire du bien sur un poste.
Si on te parle d’objectifs, arrives-tu à te projeter ?
Pas du tout ! Par rapport à tout ce que j’ai traversé, je vis plus au jour le jour. Je profite de chaque instant. Le Mondial débute samedi, j’ai encore un peu de temps pour y penser.
Maakan Tounkara en bref….
Née le 12 mars 1983 à Epernay (Marne)
Ailière droite
Clubs successifs:
1994-1999 Epernay
1999-2002 Metz
2002-2003 St Cyr s/Mer
2003-2012 Havre AC
2013- Fleury Loiret
Titres remportés :
Coupe de France (2006, 2007)
Meilleure ailière droite du championnat LFH (2008)
Challenge Cup (2012)
68 sélections et 138 buts inscrits en équipe de France
Internationale Jeunes, Juniors, A
Médaille de Bronze à l’Euro 2006 en Suède