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Euro F : le savant coaching d’Alain Portes

Euro

samedi 13 décembre 2014 - © Pierre Menjot

 6 min 10 de lecture

Séduisante dans le jeu, l’équipe de France a réussi tout ce qu’elle a entrepris dans cet Euro. Désormais à Zagreb pour le tour principal, les Bleues espèrent surfer sur leur dynamique face à la Suède, dimanche. Un match pour lequel le sélectionneur devra encore user de nouvelles cartes, comme il le fait si bien.

De notre envoyé spécial à Zagreb (Croatie)

S’il était un joueur de cartes, Alain Portes serait imbattable. Depuis le début de l’Euro, le sélectionneur tricolore distribue des jokers à n’en plus finir. Contre la Slovaquie, Prouvensier a soulagé tout son monde avec deux buts pour son premier match dans une grande compétition. Face à la Serbie, Lévêque et Glauser ont été royales. Les Monténégrines, elles, ont assisté, impuissantes, au réveil de Pineau, revenue en demi-centre shooteuse. « On a le vent dans le dos, on tente des choses et on se régale de voir que ça marche », savoure le coach de 53 ans. De la chance, vraiment ? Il n’y a qu’à interroger son entourage pour comprendre que non.

« Je n’avais que son nom en tête quand il s’est agi de chercher un coach pour nous amener très loin, vante Philippe Bana, le directeur technique national. Malin est un adjectif qui lui colle parfaitement. Il est très spécial, ils ne sont pas beaucoup comme lui. » Le dirigeant décrit un homme très fin dans son analyse, qui sait transmettre sa confiance à ses joueuses. Un technicien complet qui s’est bonifié « comme le bon vin, en vieillissant », reprend Bana. « Il a conservé sa rigueur de joueur de l’équipe de France, son côté guerrier qu’il a acquis en coachant Nîmes, et sa folie tactique ramenée de Tunisie où cet aspect était très important. »

Calme et pointilleux à l’entraînement, où il laisse néanmoins ses filles réciter leurs gammes, l’ancien Bronzé (à Barcelone en 1992) n’est jamais aussi à l’aise qu’en plein match. « Oui, j’aime beaucoup coacher, sourit-il. Manager, c’est jouer, être actif, pas seulement gérer et stresser pendant une heure. Ce que je préfère dans le métier, ce sont les matches. Certains ont peur et préfèrent l’entraînement mais moi, je me régale. » Le tout dans un calme olympien, pour que son attitude colle avec son message et inspire ses protégées. Même s’il n’hésite pas à pester, un peu, contre l’arbitrage. « Parfois, je le fais avec un peu de mauvaise foi quand il y a de petites erreurs, sinon mes joueuses auraient l’impression que je les abandonne, reprend le Nîmois. Mais je ne veux surtout pas perdre le fil du match, la priorité reste la tactique. »

Portes : « Dans le haut niveau, l’improvisation est un fantasme »

Et celle-ci est réglée comme une partition. Chaque avant-veille de match, le staff de l’équipe de France, en premier lieu desquels Johann Langloys et Philippe Carrara (photo ci-dessous), décortique le jeu adverse à la vidéo. « On donne le maximum d’informations à Alain, afin qu’il prenne les bonnes options », explique le second. Faire permuter Pineau et Niombla sur certaines attaques ou replacer Ayglon en poste 2 en défense face aux Monténégrines était donc calculé. « On réduit la part de hasard », explique Fredéric Pérez, l’entraîneur des gardiennes. « Dans le haut niveau, l’improvisation est un fantasme », renchérit le sélectionneur.

Avec un an de vécu, le staff connaît mieux ses joueuses et, surtout, a trouvé une complémentarité qu’il peut mettre en application en match. « Le coach ne voit pas tout, continue Carrara, fin observateur des adversaires à l’échauffement. L’adjoint est aussi là pour voir les petits détails. Et avec Fred Pérez, qui est en tribunes, on communique par le regard. Quand j’ai un doute, je le regarde et hier (vendredi), c’est lui qui a validé l’entrée de Glauser. Depuis le début, tout ce que je souffle à Alain, il le fait. Il a une confiance totale en nous. »

La polyvalence des joueuses favorise aussi ce managérat, à l’image des gardiennes Leynaud et Glauser, « tout à fait complémentaires donc qu’on peut faire tourner facilement pendant un match », apprécie Pérez, qui n’hésite pas à apporter quelques conseils à l’une ou l’autre lors des rencontres. Les solutions sont multiples pour le collectif bleu-blanc-rouge, par exemple capable de défendre en 1-5, de tenter une double stricte ou de décaler Lacrabère en demi-centre. Voire de brouiller totalement les cartes en lançant Attingré dans les cages. « Les adversaires la connaissent peu, alors c’est une possibilité, avoue Pérez. Elle reste concernée et on veut que quand on ouvrira la cage, la lionne sera prête à bondir. » La Suède, puis l’Allemagne et les Pays-Bas, au style de jeu bien différent de ceux aperçus à Osijek, offrent de nouvelles équations aux Tricolores. « On a travaillé des trucs qu’on n’a pas montré… », sourit Portes. Qui n’a pas encore joué tous les atouts qu'il a en main.

*************************

Tour principal de l'Euro 2014
A Zagreb, Arena Zagreb
Le dimanche 14 décembre à 18 heures
Suède – France
En direct sur Sport +

Un barrage ultra-relevé avant le Mondial ?
L’EHF a pris une décision. Contrairement aux éditions précédentes qui offraient un ticket pour le Mondial aux trois équipes médaillées, seul le champion d’Europe sera qualifié pour le Championnat du monde 2015. Pour les autres, un barrage aller-retour sera indispensable pour voir le Danemark (5-20 décembre). Les équipes les mieux classées lors de l‘Euro (2e, 3e, 4e…) affronteront des adversaires moins bien classés ou qui jouent actuellement des qualifications. Ce qui pourrait offrir un barrage Norvège-Russie ou un France-Serbie si les Scandinaves ou les Tricolores ne sont pas championnes d’Europe… 


Alain Portes en deuil

Le sélectionneur a appris ce samedi matin le décès de son père, Maurice, des suites d’un accident vasculaire cérébral (AVC). Maurice Portes (77 ans) était un pionnier de la détection dans le handball français. Pendant presque 30 ans, ce Languedocien, ancien international (une soixantaine de sélections dans les années 60) et agrégé d’éducation physique et sportive, a milité sans relâche pour la formation du jeune joueur. Il était aussi un fervent défenseur du sport scolaire. C’est un grand Monsieur que l’ensemble du handball national vient de perdre.

Handzone s’associe à la douleur d’Alain Portes et de toute sa famille en leur présentant de très simples mais sincères condoléances.

Euro F : le savant coaching d’Alain Portes 

Euro

samedi 13 décembre 2014 - © Pierre Menjot

 6 min 10 de lecture

Séduisante dans le jeu, l’équipe de France a réussi tout ce qu’elle a entrepris dans cet Euro. Désormais à Zagreb pour le tour principal, les Bleues espèrent surfer sur leur dynamique face à la Suède, dimanche. Un match pour lequel le sélectionneur devra encore user de nouvelles cartes, comme il le fait si bien.

De notre envoyé spécial à Zagreb (Croatie)

S’il était un joueur de cartes, Alain Portes serait imbattable. Depuis le début de l’Euro, le sélectionneur tricolore distribue des jokers à n’en plus finir. Contre la Slovaquie, Prouvensier a soulagé tout son monde avec deux buts pour son premier match dans une grande compétition. Face à la Serbie, Lévêque et Glauser ont été royales. Les Monténégrines, elles, ont assisté, impuissantes, au réveil de Pineau, revenue en demi-centre shooteuse. « On a le vent dans le dos, on tente des choses et on se régale de voir que ça marche », savoure le coach de 53 ans. De la chance, vraiment ? Il n’y a qu’à interroger son entourage pour comprendre que non.

« Je n’avais que son nom en tête quand il s’est agi de chercher un coach pour nous amener très loin, vante Philippe Bana, le directeur technique national. Malin est un adjectif qui lui colle parfaitement. Il est très spécial, ils ne sont pas beaucoup comme lui. » Le dirigeant décrit un homme très fin dans son analyse, qui sait transmettre sa confiance à ses joueuses. Un technicien complet qui s’est bonifié « comme le bon vin, en vieillissant », reprend Bana. « Il a conservé sa rigueur de joueur de l’équipe de France, son côté guerrier qu’il a acquis en coachant Nîmes, et sa folie tactique ramenée de Tunisie où cet aspect était très important. »

Calme et pointilleux à l’entraînement, où il laisse néanmoins ses filles réciter leurs gammes, l’ancien Bronzé (à Barcelone en 1992) n’est jamais aussi à l’aise qu’en plein match. « Oui, j’aime beaucoup coacher, sourit-il. Manager, c’est jouer, être actif, pas seulement gérer et stresser pendant une heure. Ce que je préfère dans le métier, ce sont les matches. Certains ont peur et préfèrent l’entraînement mais moi, je me régale. » Le tout dans un calme olympien, pour que son attitude colle avec son message et inspire ses protégées. Même s’il n’hésite pas à pester, un peu, contre l’arbitrage. « Parfois, je le fais avec un peu de mauvaise foi quand il y a de petites erreurs, sinon mes joueuses auraient l’impression que je les abandonne, reprend le Nîmois. Mais je ne veux surtout pas perdre le fil du match, la priorité reste la tactique. »

Portes : « Dans le haut niveau, l’improvisation est un fantasme »

Et celle-ci est réglée comme une partition. Chaque avant-veille de match, le staff de l’équipe de France, en premier lieu desquels Johann Langloys et Philippe Carrara (photo ci-dessous), décortique le jeu adverse à la vidéo. « On donne le maximum d’informations à Alain, afin qu’il prenne les bonnes options », explique le second. Faire permuter Pineau et Niombla sur certaines attaques ou replacer Ayglon en poste 2 en défense face aux Monténégrines était donc calculé. « On réduit la part de hasard », explique Fredéric Pérez, l’entraîneur des gardiennes. « Dans le haut niveau, l’improvisation est un fantasme », renchérit le sélectionneur.

Avec un an de vécu, le staff connaît mieux ses joueuses et, surtout, a trouvé une complémentarité qu’il peut mettre en application en match. « Le coach ne voit pas tout, continue Carrara, fin observateur des adversaires à l’échauffement. L’adjoint est aussi là pour voir les petits détails. Et avec Fred Pérez, qui est en tribunes, on communique par le regard. Quand j’ai un doute, je le regarde et hier (vendredi), c’est lui qui a validé l’entrée de Glauser. Depuis le début, tout ce que je souffle à Alain, il le fait. Il a une confiance totale en nous. »

La polyvalence des joueuses favorise aussi ce managérat, à l’image des gardiennes Leynaud et Glauser, « tout à fait complémentaires donc qu’on peut faire tourner facilement pendant un match », apprécie Pérez, qui n’hésite pas à apporter quelques conseils à l’une ou l’autre lors des rencontres. Les solutions sont multiples pour le collectif bleu-blanc-rouge, par exemple capable de défendre en 1-5, de tenter une double stricte ou de décaler Lacrabère en demi-centre. Voire de brouiller totalement les cartes en lançant Attingré dans les cages. « Les adversaires la connaissent peu, alors c’est une possibilité, avoue Pérez. Elle reste concernée et on veut que quand on ouvrira la cage, la lionne sera prête à bondir. » La Suède, puis l’Allemagne et les Pays-Bas, au style de jeu bien différent de ceux aperçus à Osijek, offrent de nouvelles équations aux Tricolores. « On a travaillé des trucs qu’on n’a pas montré… », sourit Portes. Qui n’a pas encore joué tous les atouts qu'il a en main.

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Tour principal de l'Euro 2014
A Zagreb, Arena Zagreb
Le dimanche 14 décembre à 18 heures
Suède – France
En direct sur Sport +

Un barrage ultra-relevé avant le Mondial ?
L’EHF a pris une décision. Contrairement aux éditions précédentes qui offraient un ticket pour le Mondial aux trois équipes médaillées, seul le champion d’Europe sera qualifié pour le Championnat du monde 2015. Pour les autres, un barrage aller-retour sera indispensable pour voir le Danemark (5-20 décembre). Les équipes les mieux classées lors de l‘Euro (2e, 3e, 4e…) affronteront des adversaires moins bien classés ou qui jouent actuellement des qualifications. Ce qui pourrait offrir un barrage Norvège-Russie ou un France-Serbie si les Scandinaves ou les Tricolores ne sont pas championnes d’Europe… 


Alain Portes en deuil

Le sélectionneur a appris ce samedi matin le décès de son père, Maurice, des suites d’un accident vasculaire cérébral (AVC). Maurice Portes (77 ans) était un pionnier de la détection dans le handball français. Pendant presque 30 ans, ce Languedocien, ancien international (une soixantaine de sélections dans les années 60) et agrégé d’éducation physique et sportive, a milité sans relâche pour la formation du jeune joueur. Il était aussi un fervent défenseur du sport scolaire. C’est un grand Monsieur que l’ensemble du handball national vient de perdre.

Handzone s’associe à la douleur d’Alain Portes et de toute sa famille en leur présentant de très simples mais sincères condoléances.

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