La victoire française a été saluée par ce qui compte dans le handball international. A l’issue d’un Mondial où tout n’a pas été parfait au niveau de l'organisation, les Tricolores s'en sont brillamment sortis. En 2017, le pays tout entier sera mobilisé pour relever le défi et accueillir la prochaine édition. Il y aura moins de bling bling, plus d'authenticité.
L’image est anecdotique et n’a pas fait la une des médias. Et pourtant… A la fin de la finale remportée par la France, Claude Onesta qui répondait en direct au bord du terrain à nos confrères de beIn sports a croisé le regard d’Heiner Brand. Les deux hommes se sont souri et à distance, l’ancien sélectionneur allemand a levé son pouce vers le haut comme pour donner un peu plus de sens à son geste. Une scène totalement inconcevable il y a huit ans, lorsque dans le vacarme de la Köln Arena, les Tricolores s’étaient fait voler leur place en finale du championnat du Monde au profit de la Mannschaft.
Les Allemands n’auraient pas du être présents au Qatar, ils ont bénéficié d’un coup de pouce de l’IHF qui a préféré leur présence à celle de l’Australie. Une décision que Joël Delplanque, le président de la Fédération Française mais aussi membre de la Fédération Internationale continuait de défendre quelques jours avant le début de la compétition. « C’est le règlement qui a prévalu. L’Océanie n’est pas un continent et l’expérience a montré que la contribution du handball australien n’était pas à la hauteur de nos espérances. » En 7 participations à un Mondial, les Australiens n’ont jamais été au-delà de la 21ème place, terminant à cinq reprises, bons derniers. Ce seul bilan chiffré valide donc la thèse du dirigeant français. Mais que dire de l’Arabie Saoudite qui en autant de présences, n’a guère fait mieux ? Le handball doit-il s’ouvrir dans des parties du Monde où sa pratique est quasi inexistante ou rester recroqueviller sur lui-même ? L’expansion vers d’autres continents est-elle tout simplement souhaitée ? « L’organisation des Jeux de Tokyo en 2020 est très importante pour notre discipline, souligne Joël Delplanque. Le Mondial féminin aura lieu au Japon en 2019 et l’année dernière, les juniors coréennes ont été championnes du Monde, ce qui est assez significatif puisque cela n’était jamais arrivé. Nous avons aussi un espoir qu’en Chine, des programmes soient mis en place avec le soutien de l’IHF. » Pour cette édition 2015, le handball s’est donc essayé au Moyen Orient, dans un pays où le ministre des finances n’est pas la personne la plus embarrassée du système. Dimanche dernier, au cours d’une conférence de presse, le Qatar s’est livré à une espèce d’auto-satisfecit, le président de l'IHF, l'impayable Hassan Mustafa allant même jusqu’à déclarer que jamais une telle organisation n’avait connu pareille réussite.
L’émirat a su séduire une majorité d’observateurs dont les médias qui ont été pour la plupart (et nous en faisions partie) invités. Des sommes invraisemblables ont été englouties dans la construction de salles au standing inégalé et aux multiples fonctionnalités et dans lesquelles prenaient place des "spectateurs convoqués" issus du crû ou carrément importés d’Espagne (notre photo), ce qui d’ailleurs a donné lieu à des "retournements de veste" assez cocasses. L’organisation a souvent annoncé que ces salles étant pleines, il n’était plus possible de mettre en vente des billets. Une attitude (ou dysfonctionnement) invraisemblable puisque sur certains matches, le remplissage était une illusion d'optique. Les fans des équipes européennes notamment, ont aussi fait la triste expérience qu’une fois l’obstacle du sésame en poche franchi, le siège escompté était souvent occupé par quelqu'un d'autre. Pire même, les supporters des nations éliminées qui avaient payé leur place ont vu leur accès refusé sous prétexte qu'il fallait qu'il y ait un maximum de soutien à l'équipe locale. Faisant face à des protestations de plus en plus marquées et remarquées, l'organisation a du assouplir ses diktats. Malgré tout ce qui avait été mis en œuvre, le Qatar n'est pas parvenu à devenir champion du Monde, l'argent n'a pas tout réglé et pour la 5ème fois de son histoire, l'équipe de France est devenue championne du Monde. Elle participera aux Jeux de Rio 2016 et depuis dimanche soir, notre pays s'est lancé dans la promotion du Mondial 2017.
Cela fait un petit moment que Joël Delplanque a séché les larmes du désespoir, versées il y a quatre ans à Malmö lorsque la France s’était faite grillée la politesse par le Qatar pour l’attribution de l’organisation de 2015. « Je veux croire que c’était un mal pour un bien, confesse le président de la Fédération Française. Car ce délai supplémentaire nous a permis d’étayer un dossier pour la même compétition, deux ans plus tard. Cela nous laisse aussi un délai par exemple pour aboutir à la complète rénovation de Bercy, celle de la patinoire d’Albertville, l’utilisation de la salle de Brest. Ces deux ans en plus que je ne cherchais pas, s’avèrent être finalement un avantage. » Certes, le faste ne sera pas celui qu'on vient de connaitre mais l'authenticité sera un peu plus au rendez-vous. Comme en 2001 où la réussite populaire était bien réelle avec des taux de remplissage à la hauteur de l’évènement. « On veut s’en inspirer, confirme Joël Delplanque, tout comme la recette avait très bien fonctionné en 2007 pour le Mondial féminin. Il faut essayer d’irriguer le territoire national et que le championnat du Monde puisse soutenir nos clubs et nous facilite l’accès au milieu économique. Du moins, de manière plus significative que ce qui existe. » Il y aura moins de bling bling, d'effets spéciaux, de démesure et de protocole suranné mais un retour à des valeurs un peu plus habituelles. « Une organisation renchérit Joël Delplanque ne s’improvise pas. Nous sommes tournés désormais à fond sur 2017 et tout est lié. Ce que réalise sur le plan sportif l’équipe de France depuis tant d’années nous impose à nous dirigeants, des devoirs et encore plus d’investissements (humains). » Le Mondial 2017 aura donc lieu en France, du 16 au 29 janvier dans dix villes différentes (Aix, Albertville, Brest, Lille, Metz, Montpellier, Nantes, Paris et Rouen). L’équipe nationale qui remettra son titre en jeu, y sera donc en représentation. Tout sera fait pour montrer l'exemple. Peu importe si le financement ne permet pas d'inviter les médias ou fabriquer des pseudos supporters qui applaudissent sur commande. Un Mondial qui tape dans l'œil n'est pas forcément le plus réussi même si la chanteuse... australienne Kylie Minogue se déhanche en play-back au milieu du parquet.