Mieux que les conscrites de Paul Landuré (Leynaud, Limal, Forgues...), au pied du podium de l'Euro 2004. Au moins aussi bien que la promotion Glauser / Houette, argentée au Mondial 2012, à Ostrava (République Tchèque). Les juniors françaises, millésime 1998-99, font leur entrée dans le livre d'or des sélections féminines espoirs, moins épais que celui de leurs aînées ou des autres nations majeures. Les voilà certaines de recevoir une médaille pour leur parcours quasi parfait à Celje. Cinq victoires en six matches et huit jours, un sprint d'enfer vers la première finale continentale des Bleuettes dans la catégorie.
La patience, puis l'embrasement
Elles ont infligé aux Hongroises, autres trublions du dernier carré slovène, le même traitement de choc qu'à l'Espagne, en poule. Une période pour prendre le pouls de leurs futures victimes, évacuer d'emblée le négatif ; une autre pour éparpiller l'adversaire et se régaler. Ainsi, l'écart en première mi-temps est demeuré compris entre -2 (0-2, 3') et +2 (6-4, 12'). L'efficience de Noemi Hafra, arrière au MTK Budapest (7 buts), n'a jamais paru troubler, affoler les Françaises. « On a maîtrisé les rythmes, le score, analyse l'arrière droit Jannéla Blonbou. On a su discerner les moments pour pousser les ballons de ceux où il fallait les conserver. »
Leurs capacités de gestion, leur patience ont été récompensées à l'approche de la pause. Sur deux pertes de balle magyares, Constance Mauny et Pauline Plotton ont réinstallé la France aux commandes (14-12). L'ailière de Chambray et la pivot de Nice ignoraient alors que ce serait définitif. Car durant la seconde demi-heure, un nouvel incendie était signalé côté tricolore. Déclenché par Blonbou. Incandescente, dévastatrice à 9 mètres et au-delà. La gauchère de l'OGCN a signé à son deuxième meilleur total journalier à l'Euro (9 buts, derrière les 10 de France – Espagne). Seule à trouver l'ouverture en début de partie, Soukeïna Sagna (photo ci-dessus, Karichma Ekoh au second plan) a dégainé sa spéciale en un contre un. Méline Nocandy a démoli ce qu'il restait de la défense magyare, la 0-6 française a forcé les Hongroises à tirer hors cadre ou sur Camille Depuiset, aussi zélée que Roxanne Frank avant elle (45 % d'arrêts pour la future Bisontine).
A +7 à dix minutes du terme (28-21, 50'), le match de classement du Mondial jeunes 2016 (perdu 31-34, face à ces mêmes Hongroises) était soldé. Il n'y avait plus rien à craindre. Même pas de revivre l'embardée ayant coûté une qualification anticipée en demies, trois jours plus tôt. « On n'a pas voulu reproduire les erreurs commises contre le Danemark (défaite 25-27), souligne Blonbou. Au money time, nous n'avions pas su garder notre avance. On a appris. »
Blonbou banalise l'événement
Le premier podium international de la relève française depuis cinq ans est donc acquis. Ce n'est certainement pas une fin. La vague ondulée, que forment les Françaises avant leurs matches, n'a pas fini de déferler sur Celje et l'Europe de la balle collante. Pour espérer se couvrir d'or, la phalange d'Eric Baradat devra passer sur le ventre de la Russie. Son bourreau en quart de finale du championnat du monde U18, il y a un an (19-24).
Dans l'esprit de Jannéla Blonbou, ruée vers l'or ou pas, retrouvailles ou pas, rien ne change. Aussi importante soit-elle, « nous aborderons la finale comme un autre match. Nous cherchons toujours à régler nos problèmes en attaque et en défense. » La banalisation, le perfectionnisme revendiqué par des gamines de 18 et 19 ans, au service de l'exceptionnel.
Roxanne Frank (gardienne de but) : « Au coup de sifflet final, la joie a éclaté, le bonheur d'être allé chercher cette finale sans jamais lâcher. Il fallait user les Hongroises, rester lucides. Maintenant, il reste une étape. Dimanche, on va jouer en gardant la même rigueur et le même état d'esprit. On est très terre à terre. On bosse chaque jour pour mieux jouer ensemble, match après match. »
Krisztina Pigniczki (entraîneure-adjointe des juniors hongroises, ex-joueuse d'Issy/Paris) : « Nous sommes très déçues, nous pensions pouvoir jouer la finale. Malheureusement, nos joueuses n'étaient pas dans leur meilleure forme. Les Françaises ont très bien défendu, elles ont mérité leur victoire. Félicitations à elles. Notre objectif était de terminer dans les quatre premiers, on va maintenant essayer de récupérer la troisième place. »