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EDF M: L'adversité resserre les liens et transcende l'individu

Euro

mardi 9 janvier 2018 - © Yves Michel

 6 min 1 de lecture

Ces dernières semaines, l'équipe de France n'a pas été épargnée par les blessures mais au lieu de sombrer dans le doute et la morosité, le groupe a choisi de positiver. Les exemples sont nombreux. Une formation amoindrie peut trouver dans l'adversité, une belle source de motivation.

par Yves MICHEL


Quel entraîneur peut affirmer sans ciller que son équipe est prête à 100% à peine trois jours avant le début de l’Euro ? 

La Croatie chez elle ? Dans un pays qui pendant plus de deux semaines ne va vivre que pour le handball, la sélection nationale figure parmi les grandes favorites au titre. Mais pendant la préparation, l’entraîneur Lino Cervar n’a cessé de se plaindre. Notamment de sa défense après le dernier match remporté chichement face au Monténégro (25-22). Il peut toutefois se satisfaire de disposer d’un effectif quasiment au complet. Même Duvnjak opéré en avril dernier du genou et qui a repris début décembre, semble aller de mieux en mieux.

Nicolaj Jacobsen, le mentor danois, a décidé d’amener 18 joueurs en Croatie. Tout simplement parce que des doutes trottent encore dans sa tête. Sur la forme de son ailier droit Lasse Svan, sur l’état du genou droit de Mikkel Hansen. Depuis une semaine, le bulletin de santé de la star parisienne a alimenté la chronique. Du liquide synovial s’est introduit dans l’articulation et il fallait le retirer. Pour préserver l’intégrité du joueur, il a été laissé au repos et l'inactivité peut s'avérer pénalisante.

La Slovénie, médaille de bronze au dernier Mondial a connu une véritable hécatombe puisqu’au récent forfait du pivot Matej Gaber (pied cassé) s’est rajoutée l’inquiétude sur la participation de l’arrière droit Jure Dolenec (opéré du ménisque en novembre et qui n’a toujours pas repris) et de Nik Henigman (genou). C’est désormais au tour du Montpelliérain Vid Kavticnik de s’arrêter entre 3 et 10 jours pour un problème à la main qui lui a valu 5 points de suture. Veselin Vujovic, le sélectionneur a largement tapé dans ses réserves.

Et la France ?

Depuis la dernière Golden League à l’automne dernier, après l’arrêt de Thierry Omeyer et de Daniel Narcisse, l’équipe de France n'a pas été épargnée. Un côté gauche décimé puisque les forfaits de Garain, d’Accambray et Nyokas se sont rajoutés à celui plus ancien de Grébille, les pivots ont été touchés puisqu’après le renoncement de Fabrégas, la participation de Luka Karabatic est pour l’instant mise en suspens. Il a fallu appeler du renfort et puiser comme peut-être jamais les coaches ne l’avaient fait dans la liste des 28.

Une équipe doit-elle disparaître du rang des favoris dès lors qu’elle présente un effectif amoindri ? Sans préjuger de la qualité de ceux qui ont été appelés en renfort. « Cela peut resserrer les liens entre ceux qui sont là, valide Daniel Costantini. L'instinct de survie peut intervenir. Le coach va essayer de responsabiliser tous les joueurs, du plus humble au plus capé. Il faut qu’il maintienne tout le monde concerné. En général, les épreuves, ça soude, l’exemple de l’Allemagne en 2016 est significatif. » La Mannschaft a en effet abordé l’Euro polonais bien entamée. Gensheimer, Groetzki, Wiencek, Drux et Allendorf se sont blessés avant la compétition et ont du renoncer, Weinhold et Dissinger sont sur le flanc à l’entame de la dernière semaine et deux renforts quasi inconnus ont été appelés. Le miracle se produit et les Allemands arrivent en finale et la gagnent.



Les nuits agitées de 2000

Tout a une signification et la sublimation n'est pas due au hasard. « Cela veut aussi dire qu’à moments donnés, argumente Greg Anquetil (notre photo), champion du Monde en 1995 et 2001, quand tu n’as pas ce qu’on appelle certains  tauliers, ceux qui rongent leur frein depuis longtemps, sont sur motivés dès qu’ils sont convoqués. Et le jour où tu les lâches sur le terrain, ils ont envie de bien faire et cela peut marcher. Raphaël Caucheteux en est actuellement, l'illustration parfaite. » Et celui qui est désormais consultant pour le groupe M6, de se rappeler de l’Euro 2000, (comme par hasard) en Croatie où les Français étaient partis avec une équipe recomposée, au sein de laquelle les rescapés des Barjots n’étaient guère nombreux. « Daniel avait pris en gros, la plus petite équipe de France possible, presque une équipe B. Cela ne nous a pas empêchés d’aller en demi-finale et de rater le bronze pour un but. C’est là qu’on a pu découvrir un gars comme Marc Wiltberger et les prémices d’une belle génération avec notamment Didier Dinart et Bertrand Gille. » Surplace les Croates avaient une définition assez particulière de l’hospitalité. Notamment pour les adversaires de la sélection nationale, les nuits précédant chaque match. « On avait été réveillé dans nos chambres par la sonnerie du téléphone toutes les 10 minutes, sans compter les coups dans les portes, les pétards, les klaxons à l’extérieur. »  Dans l’adversité, cette équipe de France "de transition" s'était donc surpassée. Elle saura le faire à maintes reprises par la suite, faisant fi des aléas et de la fragilité des organismes. « Même cette fois sur cet Euro, renchérit Greg Anquetil. Il y a des blessés et je n’ai pas l’impression d’avoir vu une équipe qui a baissé de niveau. Ceux qui sont là, comme on dit, pour faire le compte sont largement en capacité de nous ramener une médaille. » 



Le contre-exemple de 2012

Sans remonter trop loin dans le temps, en 2014, l’équipe de France était partie à l'assaut de l’Euro danois sans grandes certitudes. Un an plus tôt, Didier Dinart avait mis fin à sa carrière internationale et surtout, Thierry Omeyer qui réintègrera l'effectif en cours d'épreuve, était en phase de convalescence après une opération au biceps gauche. « C’est vrai qu’on ne s’est pas présenté là-bas avec la totalité de nos moyens, confirme Michaël Guigou. La défense avec l’arrêt de Didier devait retrouver ses marques, on a du changer notre façon d’aborder les rencontres. Je pense que ces équipes qui deviennent surprenantes alors qu’on ne les attendait peut-être pas, naissent dans les grands moments. En défense, on s’en est très bien sorti et on est même allé au bout !»  A contrario, en 2012, tous les voyants étaient (du moins en apparence) au vert, chaque ligne était bien remplie. On connait le résultat. « Comme quoi, cela ne veut rien dire, opine Cédric Sorhaindo. On avait sur le papier, une très grosse équipe et on n’a pas su surmonter la difficulté. Peut-être qu’on s’est trop éparpillé pendant la prépa. En tout cas, on a su tirer les leçons de cet échec et on a su rebondir par la suite (en gagnant 7 mois plus tard, les Jeux de Londres). » Sans tomber dans un optimisme béat, les 18 qui s’envolent ce mercredi vers la Croatie, sont déjà investis d'une mission, celle de se dépasser pour surtout ne rien avoir à se reprocher. Le marathon débute face à la Norvège. D’entrée par l’affiche du groupe. Sans aucun répit. Il s’agira au passage, de la 7ème confrontation en un an entre les deux équipes.   

EDF M: L'adversité resserre les liens et transcende l'individu 

Euro

mardi 9 janvier 2018 - © Yves Michel

 6 min 1 de lecture

Ces dernières semaines, l'équipe de France n'a pas été épargnée par les blessures mais au lieu de sombrer dans le doute et la morosité, le groupe a choisi de positiver. Les exemples sont nombreux. Une formation amoindrie peut trouver dans l'adversité, une belle source de motivation.

par Yves MICHEL


Quel entraîneur peut affirmer sans ciller que son équipe est prête à 100% à peine trois jours avant le début de l’Euro ? 

La Croatie chez elle ? Dans un pays qui pendant plus de deux semaines ne va vivre que pour le handball, la sélection nationale figure parmi les grandes favorites au titre. Mais pendant la préparation, l’entraîneur Lino Cervar n’a cessé de se plaindre. Notamment de sa défense après le dernier match remporté chichement face au Monténégro (25-22). Il peut toutefois se satisfaire de disposer d’un effectif quasiment au complet. Même Duvnjak opéré en avril dernier du genou et qui a repris début décembre, semble aller de mieux en mieux.

Nicolaj Jacobsen, le mentor danois, a décidé d’amener 18 joueurs en Croatie. Tout simplement parce que des doutes trottent encore dans sa tête. Sur la forme de son ailier droit Lasse Svan, sur l’état du genou droit de Mikkel Hansen. Depuis une semaine, le bulletin de santé de la star parisienne a alimenté la chronique. Du liquide synovial s’est introduit dans l’articulation et il fallait le retirer. Pour préserver l’intégrité du joueur, il a été laissé au repos et l'inactivité peut s'avérer pénalisante.

La Slovénie, médaille de bronze au dernier Mondial a connu une véritable hécatombe puisqu’au récent forfait du pivot Matej Gaber (pied cassé) s’est rajoutée l’inquiétude sur la participation de l’arrière droit Jure Dolenec (opéré du ménisque en novembre et qui n’a toujours pas repris) et de Nik Henigman (genou). C’est désormais au tour du Montpelliérain Vid Kavticnik de s’arrêter entre 3 et 10 jours pour un problème à la main qui lui a valu 5 points de suture. Veselin Vujovic, le sélectionneur a largement tapé dans ses réserves.

Et la France ?

Depuis la dernière Golden League à l’automne dernier, après l’arrêt de Thierry Omeyer et de Daniel Narcisse, l’équipe de France n'a pas été épargnée. Un côté gauche décimé puisque les forfaits de Garain, d’Accambray et Nyokas se sont rajoutés à celui plus ancien de Grébille, les pivots ont été touchés puisqu’après le renoncement de Fabrégas, la participation de Luka Karabatic est pour l’instant mise en suspens. Il a fallu appeler du renfort et puiser comme peut-être jamais les coaches ne l’avaient fait dans la liste des 28.

Une équipe doit-elle disparaître du rang des favoris dès lors qu’elle présente un effectif amoindri ? Sans préjuger de la qualité de ceux qui ont été appelés en renfort. « Cela peut resserrer les liens entre ceux qui sont là, valide Daniel Costantini. L'instinct de survie peut intervenir. Le coach va essayer de responsabiliser tous les joueurs, du plus humble au plus capé. Il faut qu’il maintienne tout le monde concerné. En général, les épreuves, ça soude, l’exemple de l’Allemagne en 2016 est significatif. » La Mannschaft a en effet abordé l’Euro polonais bien entamée. Gensheimer, Groetzki, Wiencek, Drux et Allendorf se sont blessés avant la compétition et ont du renoncer, Weinhold et Dissinger sont sur le flanc à l’entame de la dernière semaine et deux renforts quasi inconnus ont été appelés. Le miracle se produit et les Allemands arrivent en finale et la gagnent.



Les nuits agitées de 2000

Tout a une signification et la sublimation n'est pas due au hasard. « Cela veut aussi dire qu’à moments donnés, argumente Greg Anquetil (notre photo), champion du Monde en 1995 et 2001, quand tu n’as pas ce qu’on appelle certains  tauliers, ceux qui rongent leur frein depuis longtemps, sont sur motivés dès qu’ils sont convoqués. Et le jour où tu les lâches sur le terrain, ils ont envie de bien faire et cela peut marcher. Raphaël Caucheteux en est actuellement, l'illustration parfaite. » Et celui qui est désormais consultant pour le groupe M6, de se rappeler de l’Euro 2000, (comme par hasard) en Croatie où les Français étaient partis avec une équipe recomposée, au sein de laquelle les rescapés des Barjots n’étaient guère nombreux. « Daniel avait pris en gros, la plus petite équipe de France possible, presque une équipe B. Cela ne nous a pas empêchés d’aller en demi-finale et de rater le bronze pour un but. C’est là qu’on a pu découvrir un gars comme Marc Wiltberger et les prémices d’une belle génération avec notamment Didier Dinart et Bertrand Gille. » Surplace les Croates avaient une définition assez particulière de l’hospitalité. Notamment pour les adversaires de la sélection nationale, les nuits précédant chaque match. « On avait été réveillé dans nos chambres par la sonnerie du téléphone toutes les 10 minutes, sans compter les coups dans les portes, les pétards, les klaxons à l’extérieur. »  Dans l’adversité, cette équipe de France "de transition" s'était donc surpassée. Elle saura le faire à maintes reprises par la suite, faisant fi des aléas et de la fragilité des organismes. « Même cette fois sur cet Euro, renchérit Greg Anquetil. Il y a des blessés et je n’ai pas l’impression d’avoir vu une équipe qui a baissé de niveau. Ceux qui sont là, comme on dit, pour faire le compte sont largement en capacité de nous ramener une médaille. » 



Le contre-exemple de 2012

Sans remonter trop loin dans le temps, en 2014, l’équipe de France était partie à l'assaut de l’Euro danois sans grandes certitudes. Un an plus tôt, Didier Dinart avait mis fin à sa carrière internationale et surtout, Thierry Omeyer qui réintègrera l'effectif en cours d'épreuve, était en phase de convalescence après une opération au biceps gauche. « C’est vrai qu’on ne s’est pas présenté là-bas avec la totalité de nos moyens, confirme Michaël Guigou. La défense avec l’arrêt de Didier devait retrouver ses marques, on a du changer notre façon d’aborder les rencontres. Je pense que ces équipes qui deviennent surprenantes alors qu’on ne les attendait peut-être pas, naissent dans les grands moments. En défense, on s’en est très bien sorti et on est même allé au bout !»  A contrario, en 2012, tous les voyants étaient (du moins en apparence) au vert, chaque ligne était bien remplie. On connait le résultat. « Comme quoi, cela ne veut rien dire, opine Cédric Sorhaindo. On avait sur le papier, une très grosse équipe et on n’a pas su surmonter la difficulté. Peut-être qu’on s’est trop éparpillé pendant la prépa. En tout cas, on a su tirer les leçons de cet échec et on a su rebondir par la suite (en gagnant 7 mois plus tard, les Jeux de Londres). » Sans tomber dans un optimisme béat, les 18 qui s’envolent ce mercredi vers la Croatie, sont déjà investis d'une mission, celle de se dépasser pour surtout ne rien avoir à se reprocher. Le marathon débute face à la Norvège. D’entrée par l’affiche du groupe. Sans aucun répit. Il s’agira au passage, de la 7ème confrontation en un an entre les deux équipes.   

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