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Toulouse, la grande illusion...

LBE

samedi 24 juillet 2010 - © Davy Bodiguel

 6 min 28 de lecture

Plombé par une situation financière catastrophique, le club Féminin de Toulouse a dit adieu le 15 juillet dernier à la Ligue Féminine de Handball... Depuis plusieurs semaines déjà, le TFH était sous la menace d'une rétrogradation de la part de la Fédération Française de Handball, faute d'avoir pu honorer ses dettes. Au-delà de la difficulté de vivre à l'ombre du Stade Toulousain Rugby et du TéFéCé Football, ce sont les effets d'annonce des dirigeants du club et la viabilité du projet qui suscitent aujourd'hui bon nombre d'interrogations. Voici donc le feuilleton d'un club qui a voulu grandir trop vite, d'une saison 2009/10 rocambolesque et surtout d'un été rempli d'incertitudes pour les salariés et joueuses du TFH.

"Qu'il est loin mon pays, qu'il est loin..." tels sont les premiers mots du poète Claude Nougaro dans sa chanson hommage à sa ville natale. Pour les dirigeants du Toulouse Féminin Handball, les premiers mots qui viennent à l'esprit seraient plutôt "qu'il est loin mon défi... qu'il est loin". Car le défi lancé deux ans auparavant par Olivier Manutahi et l'équipe dirigeante du Toulouse Féminin Handball était de faire du club de la Ville Rose un bastion du handball féminin Hexagonal.

Voilà donc Marie Gaillard et ses coéquipières reparties début 2007 en N1 à l'assaut d'une accession en D2. Fort d'un recrutement ambitieux, Toulouse prenait la tête du championnat en compagnie d'Abbeville. A cette époque, le président Toulousain Manutahi annonçait une montée prochaine en D1, balayant ainsi quelques idées saugrenues d'obervateurs pessimistes qui le prenaient... dixit "pour un fou".

Malgré sa seconde place, le TFH obtient son billet pour la D2 après une qualification en barrages d'accession contre Montluçon. Septembre 2008, l'arrivée dans l'antichambre de l'élite coincide avec le recrutement de nouvelles joueuses et surtout d'un duo d'entraineurs, Olivier Orfèvres et Christian Latulippe, fraîchement débarqués pour faire du TFH un club de haut niveau. Saison 2008/2009... même issue que la précédente, Laura Lerus-Orfèvres et ses partenaires jouent les premiers rôles et atteignent leur objectif, le retour en première Division.

L'été 2009 fut pour le moins animé sur les bords de la Garonne... Une montée en température avec l'avènement d'une équipe new-look pour bien figurer en LFH : de nombreuses recrues font leur apparition en Haute-Garonne et notamment les Internationales A Alexandra Lacrabère, Vanessa Jelic et Sophie Herbrecht. Ajoutées à cela, quelques pointures rompues au haut niveau (Marion Callavé, Isabelle Cendier) et des jeunes pousses en devenir (Christelle Manga, Estelle Nze Minko)... Bref, un recrutement littéralement majestueux et un collectif qui a fière allure. Au sortir de l'été, le public Toulousain et les médias se réjouissent ainsi de ce retour en D1, 7 ans après une dernière apparition.

Ayant réussi leur passage devant la CNCG et après la visite de Patricia Saurina (présidente de la LFH), les dirigeants annoncent un objectif mesuré pour cette saison 2009/10 : un bon maintien et une participation aux play-offs parmi les six meilleurs clubs de France. Et Toulouse sait qu'il va devoir apprendre, la sévère défaite en ouverture à Compans-Caffarelli face au Havre en est l'illustration. Des débuts hésitants avant une montée en régime progressive, le TFH réussit quelques performances fin 2009 à Nîmes ou encore à Dijon.

Sportivement, la situation est au beau fixe... mais les premiers soucis financiers sont soujaccents avec quelques retards de paiement fin 2009. Passée la trêve des confiseurs, la troupe d'Olivier Orfèvres redémarre son championnat sur les chapeaux de roue avec cinq victoires en six matchs en janvier et février.

UN TROU DE 200.000€

Si le TFH fait parler de lui sur le terrain, la situation en coulisses est en revanche préoccupante : en septembre 2009, la direction technique nationale avait alors autorisé provisoirement Olivier Orfèvres à entraîner l'équipe, sous réserve de participer à un stage obligatoire début janvier. L'interessé n'y participe pas et le club Toulousain s'attire ainsi les foudres de la Fédération Française de Handball. Conséquence, le TFH se voit ainsi retirer 10 points en championnat et infliger 10.000 euros d'amende pour non-conformité des diplômes d'entraineur. Malgré un recours, la décision Fédérale est implacable : Toulouse se retrouve au beau milieu de son championnat, bon dernier du classement... passant de 27 à 17 points.

Plus grave, le club accuse en février un trou dans sa trésorerie de 200.000 euros : à l'origine, les dirigeants attendaient des subventions qui tardent à venir... et qui finalement ne viendront jamais. Face à la situation qui s'aggrave de jour en jour, les joueuses accusent le coup : inquiètes pour la fin de saison, elles iront même jusqu'à éviter de justesse le forfait à Arvor en faisant le long déplacement en Bretagne par leurs propres moyens. Une attitude exemplaire, en ce 26 mars, au vu de ces circonstances exceptionnelles.

Le mois de Mars est celui des premières illusions : le président Manutahi annonce à la presse le montage d'un pool de partenaires privés. Dans le même temps, la municipalité Toulousaine est aux côtés du TFH avec le projet d'une rallonge de 50.000€ en complément de la subvention de 350.000€ fraîchement votée. Un effort non négligeable d'une équipe municipale qui n'aura pas ménagée sa peine pour soutenir son club de Handball Féminin. Un effort que ne fera pas le Conseil Régional.

Toulouse joue ainsi les play-downs dans une atmosphère pesante : malgré les craintes de dépôt de bilan, le collectif Toulousain valide son maintien sur le terrain et obtient même une place de demi-finaliste en Coupe de France face à Metz. Une éclaircie dans la grisaille ambiante.

Les épisodes se suivent et se ressemblent en cette fin de saison : fin mai, le TFH reprend espoir avec l'annonce d'Olivier Manutahi de l'arrivée de six nouveaux partenaires. Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seul, le président Haut-Garonnais déclare avoir pu présenter un bilan équilibré devant la CNCG. Dans la foulée, le TFH se remet à croire en ses chances : il annonce le renfort de cinq joueuses dont les vice-championnes du Monde de l'équipe de France, Linda Pradel et Paule Baudouin.

Des effets d'annonce sans lendemain puisque le club est exclu en juin du secteur élite féminin et interdit de recrutement par cette même Commission Nationale de Contrôle de Gestion (CNCG). Un coup de massue terrible avec en point d'orgue, la rétrogradation automatique en D2. Le navire Toulousain coule et les Internationales sont automatiquement libérées : c'est ainsi par exemple que Sophie Herbrecht signe à Nîmes ou Alexandra Lacrabère à Arvor.

Dernier coup fatal porté à la mi-juillet au Toulouse Féminin Handball : la Fédération décide de le rétrograder en N2, faute de n'avoir pas pu régler ses dettes fédérales. La mort du Handball Féminin professionnel dans la préfecture de Midi-Pyrénées est ainsi prononcée. Fin des illusions pour les salariés, dirigeants et joueuses : le rêve imaginé il y a deux ans n'était finalement qu'un mirage... une illusion.

Appelés à s'exprimer dans les médias locaux, les dirigeants du TFH ne donnent pour l'heure aucune explication. Olivier Manutahi n'a pas daigné répondre aux sollicitations de nos confrères de la Dépêche du Midi. Un silence pesant face aux nombreuses interrogations des observateurs du handball... mais aussi et surtout à l'incompréhension et à la déception des salariés du club. Le handball Midi-Pyrénéen perd dans cette affaire son plus beau représentant, pas sur que les handballeuses professionnelles remettent les pieds de sitôt dans la ville Rose.

Toulouse, la grande illusion... 

LBE

samedi 24 juillet 2010 - © Davy Bodiguel

 6 min 28 de lecture

Plombé par une situation financière catastrophique, le club Féminin de Toulouse a dit adieu le 15 juillet dernier à la Ligue Féminine de Handball... Depuis plusieurs semaines déjà, le TFH était sous la menace d'une rétrogradation de la part de la Fédération Française de Handball, faute d'avoir pu honorer ses dettes. Au-delà de la difficulté de vivre à l'ombre du Stade Toulousain Rugby et du TéFéCé Football, ce sont les effets d'annonce des dirigeants du club et la viabilité du projet qui suscitent aujourd'hui bon nombre d'interrogations. Voici donc le feuilleton d'un club qui a voulu grandir trop vite, d'une saison 2009/10 rocambolesque et surtout d'un été rempli d'incertitudes pour les salariés et joueuses du TFH.

"Qu'il est loin mon pays, qu'il est loin..." tels sont les premiers mots du poète Claude Nougaro dans sa chanson hommage à sa ville natale. Pour les dirigeants du Toulouse Féminin Handball, les premiers mots qui viennent à l'esprit seraient plutôt "qu'il est loin mon défi... qu'il est loin". Car le défi lancé deux ans auparavant par Olivier Manutahi et l'équipe dirigeante du Toulouse Féminin Handball était de faire du club de la Ville Rose un bastion du handball féminin Hexagonal.

Voilà donc Marie Gaillard et ses coéquipières reparties début 2007 en N1 à l'assaut d'une accession en D2. Fort d'un recrutement ambitieux, Toulouse prenait la tête du championnat en compagnie d'Abbeville. A cette époque, le président Toulousain Manutahi annonçait une montée prochaine en D1, balayant ainsi quelques idées saugrenues d'obervateurs pessimistes qui le prenaient... dixit "pour un fou".

Malgré sa seconde place, le TFH obtient son billet pour la D2 après une qualification en barrages d'accession contre Montluçon. Septembre 2008, l'arrivée dans l'antichambre de l'élite coincide avec le recrutement de nouvelles joueuses et surtout d'un duo d'entraineurs, Olivier Orfèvres et Christian Latulippe, fraîchement débarqués pour faire du TFH un club de haut niveau. Saison 2008/2009... même issue que la précédente, Laura Lerus-Orfèvres et ses partenaires jouent les premiers rôles et atteignent leur objectif, le retour en première Division.

L'été 2009 fut pour le moins animé sur les bords de la Garonne... Une montée en température avec l'avènement d'une équipe new-look pour bien figurer en LFH : de nombreuses recrues font leur apparition en Haute-Garonne et notamment les Internationales A Alexandra Lacrabère, Vanessa Jelic et Sophie Herbrecht. Ajoutées à cela, quelques pointures rompues au haut niveau (Marion Callavé, Isabelle Cendier) et des jeunes pousses en devenir (Christelle Manga, Estelle Nze Minko)... Bref, un recrutement littéralement majestueux et un collectif qui a fière allure. Au sortir de l'été, le public Toulousain et les médias se réjouissent ainsi de ce retour en D1, 7 ans après une dernière apparition.

Ayant réussi leur passage devant la CNCG et après la visite de Patricia Saurina (présidente de la LFH), les dirigeants annoncent un objectif mesuré pour cette saison 2009/10 : un bon maintien et une participation aux play-offs parmi les six meilleurs clubs de France. Et Toulouse sait qu'il va devoir apprendre, la sévère défaite en ouverture à Compans-Caffarelli face au Havre en est l'illustration. Des débuts hésitants avant une montée en régime progressive, le TFH réussit quelques performances fin 2009 à Nîmes ou encore à Dijon.

Sportivement, la situation est au beau fixe... mais les premiers soucis financiers sont soujaccents avec quelques retards de paiement fin 2009. Passée la trêve des confiseurs, la troupe d'Olivier Orfèvres redémarre son championnat sur les chapeaux de roue avec cinq victoires en six matchs en janvier et février.

UN TROU DE 200.000€

Si le TFH fait parler de lui sur le terrain, la situation en coulisses est en revanche préoccupante : en septembre 2009, la direction technique nationale avait alors autorisé provisoirement Olivier Orfèvres à entraîner l'équipe, sous réserve de participer à un stage obligatoire début janvier. L'interessé n'y participe pas et le club Toulousain s'attire ainsi les foudres de la Fédération Française de Handball. Conséquence, le TFH se voit ainsi retirer 10 points en championnat et infliger 10.000 euros d'amende pour non-conformité des diplômes d'entraineur. Malgré un recours, la décision Fédérale est implacable : Toulouse se retrouve au beau milieu de son championnat, bon dernier du classement... passant de 27 à 17 points.

Plus grave, le club accuse en février un trou dans sa trésorerie de 200.000 euros : à l'origine, les dirigeants attendaient des subventions qui tardent à venir... et qui finalement ne viendront jamais. Face à la situation qui s'aggrave de jour en jour, les joueuses accusent le coup : inquiètes pour la fin de saison, elles iront même jusqu'à éviter de justesse le forfait à Arvor en faisant le long déplacement en Bretagne par leurs propres moyens. Une attitude exemplaire, en ce 26 mars, au vu de ces circonstances exceptionnelles.

Le mois de Mars est celui des premières illusions : le président Manutahi annonce à la presse le montage d'un pool de partenaires privés. Dans le même temps, la municipalité Toulousaine est aux côtés du TFH avec le projet d'une rallonge de 50.000€ en complément de la subvention de 350.000€ fraîchement votée. Un effort non négligeable d'une équipe municipale qui n'aura pas ménagée sa peine pour soutenir son club de Handball Féminin. Un effort que ne fera pas le Conseil Régional.

Toulouse joue ainsi les play-downs dans une atmosphère pesante : malgré les craintes de dépôt de bilan, le collectif Toulousain valide son maintien sur le terrain et obtient même une place de demi-finaliste en Coupe de France face à Metz. Une éclaircie dans la grisaille ambiante.

Les épisodes se suivent et se ressemblent en cette fin de saison : fin mai, le TFH reprend espoir avec l'annonce d'Olivier Manutahi de l'arrivée de six nouveaux partenaires. Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seul, le président Haut-Garonnais déclare avoir pu présenter un bilan équilibré devant la CNCG. Dans la foulée, le TFH se remet à croire en ses chances : il annonce le renfort de cinq joueuses dont les vice-championnes du Monde de l'équipe de France, Linda Pradel et Paule Baudouin.

Des effets d'annonce sans lendemain puisque le club est exclu en juin du secteur élite féminin et interdit de recrutement par cette même Commission Nationale de Contrôle de Gestion (CNCG). Un coup de massue terrible avec en point d'orgue, la rétrogradation automatique en D2. Le navire Toulousain coule et les Internationales sont automatiquement libérées : c'est ainsi par exemple que Sophie Herbrecht signe à Nîmes ou Alexandra Lacrabère à Arvor.

Dernier coup fatal porté à la mi-juillet au Toulouse Féminin Handball : la Fédération décide de le rétrograder en N2, faute de n'avoir pas pu régler ses dettes fédérales. La mort du Handball Féminin professionnel dans la préfecture de Midi-Pyrénées est ainsi prononcée. Fin des illusions pour les salariés, dirigeants et joueuses : le rêve imaginé il y a deux ans n'était finalement qu'un mirage... une illusion.

Appelés à s'exprimer dans les médias locaux, les dirigeants du TFH ne donnent pour l'heure aucune explication. Olivier Manutahi n'a pas daigné répondre aux sollicitations de nos confrères de la Dépêche du Midi. Un silence pesant face aux nombreuses interrogations des observateurs du handball... mais aussi et surtout à l'incompréhension et à la déception des salariés du club. Le handball Midi-Pyrénéen perd dans cette affaire son plus beau représentant, pas sur que les handballeuses professionnelles remettent les pieds de sitôt dans la ville Rose.